La première édition des “escales littéraires dans les îles de la Lune” a marqué un stop mardi soir à la bouquinerie de Passamainty.
Quatre îles, une culture commune. C’est à partir de ce constat qu’auteurs, conteurs, éditeurs ont décidé de se retrouver à Mayotte, en Grande Comores, à Anjouan et à Mohéli face à de potentiels lecteurs ou d’autres, déjà conquis.
Après un passage pour certains au centre universitaire de Dembéni pour une master class, cinq auteurs et un éditeur étaient réunis mardi soir dans la cour intérieure de la Bouquinerie de Passamainty, transformée pour la rencontre en scène de théâtre improvisée et multiforme. Du public et de l’arrière-scène, deux comédiens et la libraire, Isabelle Mohamed ont déclamé, lu, joué tour à tour les textes de Claire Ubac, Kebir Ammi, Salim Hatubou, Alex Godard et Nassuf Djaïlani sous l’oeil attentif de l’éditeur et journaliste Bernard Magnier. A l’issu de chaque extrait, les auteurs étaient amener à reconnaître l’œuvre de laquelle était tiré leur texte et de développer librement sur cette mise en jambe. Un exercice de plus de deux heures, vivant et rythmé, qui a effacé d’un revers de main sur la page le risque d’échanges soporifiques entre littérateurs ésotériques. Tel un voyage initiatique, l’échange a débuté et s’est terminé sous le manguier, arbre à palabre évoqué dans les deux extraits d’entame et de fin de lecture.
Par ce biais, chacun a pu aborder au grès des thèmes, son parcours son métier, ses réflexions sur l’écriture. “Quand on écrit des livres, les gens pensent que ça vient tout seul, mais je vous assure l’exercice est complexe”, témoigne Claire Ubac, auteure de livres pour la jeunesse aux éditions L’Ecole des Loisirs.
A l’issu de ses lectures à résonance biographique, le public était invité à poser des questions et lancer des réflexions, de la liberté de tout dire à la représentativité de l’artiste.
Alex Godard, créateur de bandes dessinées et de livres illustrés s’est attaché à se détacher de l’appartenance qu’on veut lui coller d’auteur culturellement localisé. “Je ne suis pas un illustrateur antillais, je suis un illustrateur”, prône-t-il. Ses livres sont édités dans une collection jeunesse. Des couleurs éclatantes, pleines de vie qui entrent parfois en résonance asymétrique avec le tragique des situations décrites par ses textes. “Ce que je veux dire c’est que sous les tropiques on pleure aussi”.
Une pratique de l’écriture qui, le rappelle Bernard Magnier, n’a pas d’universalité. “En France on a une tranquillité d’écriture. En Afrique, je tire mon chapeau à ceux qui prennent des risques en écrivant”, déplore le directeur de la collection Afrique chez Actes Sud.
A l’origine du projet, “Escales littéraires dans les îles de la lune”, il y a Salim Hatubou, auteur notamment d'”Hamouro”, roman qui relate les violences contres les étrangers perpétrés dans ce village en 2004. Son credo littéraire, la réflexion sociale qui trouve son terreau dans l’actualité. Hatubou prépare un prochain roman sur les enfants des rues à Mayotte, un thème déjà abordé dans Les démons de l’aube, histoire ayant pour héros les petits vendeurs des marchés de Moroni.
A.L.
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