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lundi 14 octobre 2024
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Transport scolaire : « Les conducteurs travaillent dans un champ de mines, mais nous n’avons pas les armes pour déminer »

Alors qu’un droit de retrait est à nouveau exercé par certains chauffeurs du Nord de l’île, ce mercredi, les représentants de la préfecture, du Conseil départemental, des forces de l’ordre, des transporteurs et des chauffeurs se sont réunis afin de faire le point sur les avancées réalisées.

Après avoir exercé leur droit de retrait en début de semaine, à la suite du caillassage de neuf bus, une vingtaine de chauffeurs du groupement de transporteurs Narendre M’Beli se sont donné rendez-vous à la préfecture de Grande-Terre. Parmi eux, Moihedja conductrice pour le transporteur Matis. Réalisant la liaison Kaweni-Dzoumogne, elle a été témoin d’une scène révélatrice des dérives que représentent les affrontements entre jeunes et les actes de vandalismes à l’encontre des véhicules de transport scolaire.

De nouvelles formes de violence semble apparaître

Crescendo de la violence

Elle raconte alors qu’au « niveau du rond-point Jumbo, les élèves dans le bus ont demandé à ce que j’arrête le véhicule alors que ceux de dehors commençaient à le caillasser ». Sachant qu’à ce niveau il n’y a pas d’arrêt, impossible pour la conductrice de les laisser sortir sur la route. Alors que la tension monte dans l’habitacle, Moihedja redouble d’effort pour ne pas se laisser déconcentrer en maintenant à flot son bus. C’était sans compter la détermination des occupants d’en découdre avec les individus hors du véhicule. Ces derniers ont alors brisé de l’intérieur les vitres après avoir découpé les ceintures de sécurité pour récupérer l’attache métallique et s’en servir comme arme.

« Sur la cinquantaine d’élèves au départ, je n’en avais plus que dix à la fin », regrette-t-elle. Un phénomène qu’elle qualifie de nouveau à ses yeux complétant la liste des insultes et autres provocations. « Le métier de chauffeur scolaire est plus compliqué que l’année dernière », finit-elle par concéder. Certains des autres conducteurs présents constatent « une évolution des troubles allant crescendo dans la violence ». Colère et incompréhension se mêlent aux échanges entre les différents acteurs réunis lors de la réunion de ce mercredi dont l’objectif, prévu lors de la dernière rencontre, consistait à faire le point sur les avancées réalisées. Les incidents de ce lundi se sont invités dans les discussions sans qu’une solution pérenne ne soit trouvée pour autant.

Le droit de retrait comme dernier recours

Une partie des participants au sortir de la réunion

C’est en tout cas le ressenti de Kamal Attoumani, délégué syndical CFDT chez le transporteur Matis : « la rencontre n’a pas permis d’apporter une solution sur les problèmes rencontrés tous les jours par les conducteurs ». Si selon lui, « nous avons reçu l’engagement qu’il y aurait des sanctions à l’encontre des personnes commettant des actes de vandalismes à l’intérieur des bus et que la sécurité allait être multipliée », il note cependant « l’absence de mesures concrètes ne permettant pas de reprendre le transport scolaire » et précise que « tant que les politiciens n’auront pas résolu le problème », le service ne reprendra pas. Il ne manque d’ailleurs pas d’user de la métaphore militaire pour décrire le contexte actuel : « les conducteurs travaillent dans un champ de mines, mais nous n’avons pas les armes pour déminer ». Sur la question des plaintes des chauffeurs, le délégué de la CFDT s’interroge, « on nous demande tous les jours de déposer plainte pour avoir des statistiques mais on ne sait pas à quoi cela sert en bout de course, car nous n’avons pas eu de retour, jamais ».

Kamal Attoumani présente les conclusions de la rencontre aux chauffeurs de bus

Une réunion pour un statut quo

La situation ne manque pas de faire réagir Carla Baltus, dirigeante de la société Carla Mayotte Transport Baltus. Au sortir de la réunion, elle note qu’en tant que patron « on ne peut pas travailler car les chauffeurs ne veulent pas rouler ». Elle n’a pas manqué de pointer du doigt le « donneur d’ordre, à savoir le Conseil départemental », affirmant que « la balle est désormais dans son camp » dans la mesure où « un certain nombre d’engagements ne sont pas respectés » ; en conséquent, la réunion d’hier semble avoir accouché, au regard de la dirigeante, « d’un statut quo ». Rien de nouveau sous le soleil donc. Un constat partagé, avec une pointe de fatum, par un des chauffeurs présent, « l’histoire se répète à chacun fois, alternant des périodes de calme et des périodes de trouble ».

Néanmoins, compte tenu de l’absence de rémunération par le Conseil départemental des entreprises membres du groupement Narendre M’Beli pour les jours non travaillés, ces dernières « ont unanimement décidé de ne pas reconnaître la validité d’une poursuite [du] droit de retrait au-delà [du] mercredi 5 octobre » impliquant pour les chauffeurs qui souhaiteraient le poursuivre de ne pas être rémunérés.

Pierre Mouysset

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