Quel parent n’a pas rêvé de communiquer avec son bébé avant qu’il n’acquiert la parole ? Une méthode importée du monde anglo-saxon arrive à Mayotte avec la langue des signes comme support d’échange.
Impossible de savoir pourquoi son bébé pleure tous les soirs quand on le couche ? Pas sûr. Une méthode anglo-saxonne permet d’échanger avec son bébé et plus seulement de supposer les raisons de son mécontentement. Si l’enfant ne peut pas encore parler, il peut faire des mouvements auxquels il attribue un sens. Il peut ainsi signifier «j’ai chaud » ou «j’ai fait pipi » à condition, pour lui et ses parents, de connaître les gestes. C’est l’objectif des ateliers « bébé signes ».
«On fait naturellement des gestes que l’on associe systématiquement à la parole, explique Florent Matheron, animateur ‘bébé signes’. Quand on dit ‘chut’ on place l’index devant la bouche. Pour dire ‘au revoir’, on secoue la main en montrant la paume. Et le bébé comprend très vite la signification de ces mouvements associés aux mots. Le principe du ‘bébé signes’ est donc de multiplier ces gestes en utilisant la langue des signes.
Pour demander à son bébé « tu as bien dormi ?», on place la main sur le côté du visage comme si c’était un oreiller. Pour lui demander s’il a soif, on fait le signe « de l’eau » en tendant son index puis en le pliant.
Un grand confort pour le bébé
«J’ai l’exemple d’une maman en métropole qui n’arrivait pas à comprendre les pleurs de son bébé à des moments précis de la journée. Et puis, un jour, le bébé a fait le signe pour dire j’ai soif. Il pleurait simplement parce qu’il voulait boire. Evidemment le signe n’est pas fait avec précision par le bébé, mais le mouvement suffit à comprendre ce qui se passe. Ca apporte un grand confort aux parents mais aussi à l’enfant qui peut communiquer.»
Florent Matheron est venu, depuis la Nouvelle-Calédonie où il vit, assurer les premières formations à cette méthode à Mayotte cette semaine. Il a dirigé deux ateliers avec des parents mais aussi des animateurs de l’ADSM, l’association à l’origine de l’opération. Elle devrait d’ailleurs former à la méthode certains membres de ses équipes dans le courant de l’année 2014.
La langue des signes, une langue à part entière
L’ADSM est l’association qui accompagne les déficient visuels ou auditifs de Mayotte. Pourtant, ces formations «Bébé signes» sont destinées à des parents qui ne sont pas en situation de handicap. «Dans cette formation, on utilise la langue des signes, nous avons donc un rôle évident dans cette expérience», explique Agnès Ramdé, la directrice de l’ADSM. «Ca permet à la langue des signes de sortir du cadre du handicap et d’être perçue pour ce qu’elle est : une langue à part entière» rajoute Florent Matheron.
La technique vient des Etats-Unis où la pratique existe depuis longtemps. «On peut considérer que c’est un phénomène de mode, comme l’ont été les bébés nageurs. Mais peu à peu, comme pour les bébés nageurs, la méthode va s’est installer comme une pratique tout à fait courante.»
Pour Florent, importer cette méthode à Mayotte est quelque chose d’important. «Il ne faut pas exclure les DOM TOM des pratiques qui se développent en métropole où on compte déjà 200 animateurs. Et à ma connaissance, c’est la première fois que l’expérience est transposée outre-mer.»
Les bébés incitent les parents à continuer
A Mayotte, ces ateliers sont financés par la direction de la cohésion sociale (DJSCS) en partenariat avec les PMI qui ont sélectionné des familles particulièrement soucieuses du bien-être et du suivi de leur bébé. Seules les mamans ont suivi la première initiation.
«Les mamans ont été émerveillées de voir que le bébé réagisse très vite. On a chanté des comptines et elles étaient surprises que le bébé en redemande. Ca se passe toujours comme ça. Ce sont les bébés qui incitent les parents à continuer.»
Les parents doivent suivre six ou sept ateliers thématiques : la nourriture, le parc, le bain… à chaque fois, ils doivent assimiler les signes essentiels de ces moments pour pouvoir les ensuite les reproduire avec leur bébé. «Les séances durent presque une heure, et les mamans ont trouvé ça trop court ! Et on sait que le soir, les papas ont chanté, à leur tour, des comptines avec le bébé. Pour les prochains ateliers, on est sûrs que les papas seront présents.»
RR
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