26.9 C
Dzaoudzi
vendredi 22 novembre 2024
AccueiljusticeCorrectionnelle : le foncier, toujours un problème !

Correctionnelle : le foncier, toujours un problème !

Un vendeur de terrain, déjà condamné à les rembourser, se retrouve au pénal pour escroquerie. Et l’homme ne s’en laissait pas compter.

Barre réducL’audience correctionnelle prenait au cours de la matinée de ce mercredi 11 mars une allure de terrasse de café : les avocats de la partie civile et de la défense allaient et venaient dans la salle du tribunal de Grande Instance, intervenaient selon leur bon vouloir auprès d’une présidente qui discutait avec le procureur, qui venait lui-même auprès d’elle consulter les dossiers. C’est que le prévenu prenait avantageusement la parole, dissertant, donnant un respectueux «madame la présidente» à chaque intervention, et reléguant pour un temps son avocat au rang de spectateur.

Car Houssen* est un personnage. Héritier parmi onze autres, d’un terrain sis à Mtsangaboua (commune de Bandraboua), il en avait vendu, entre 2008 et 2010, une partie à deux personnes, 700m2 pour 29.000€ à l’un, et la même surface pour 35.000€ à l’autre. «Vous avez laissé croire que vous en étiez propriétaire, or l’indivision n’était pas réglée», attaque Viviane Peyrot qui préside l’audience.

Il a déjà été jugé au civil en mai 2013. Il n’a pas été condamné, mais la justice lui a demandé de rembourser les acheteurs, les terrains n’ayant pas été livrés. Sûr de son bon droit, il fait alors appel indiquant ne pas pouvoir rembourser et désireux que la vente soit menée à son terme. On ne sait pas trop si le délibéré de l’appel est sorti : «je vais vous le transmettre», indiquait l’avocat des deux malheureux acheteurs, le bâtonnier Saïdal, alors que pour Me Eric Hausser qui défend l’accusé, il ne sortira qu’en mai…

Border line

Y a-t-il eu escroquerie et intention d’escroquer ? C’était tout l’enjeu de l’audience du jour. Les sommes ont été débloquées au titre d’une promesse de vente, ont été encaissées et dépensées par Houssen, «alors que vous deviez les mettre sur le compte de l’indivision», indiquait un assesseur. De plus, difficile de savoir s’il était mandaté : il a bien une procuration, «mais pour les démarches administratives pas pour la vente. D’autre part, au moment de la cession, vous ne saviez pas quel lot sur les 3 hectares allaient vous revenir !» s’exclamait le second assesseur.

Salle d'immatriculation des terrains domaniaux à la Maison du Foncier
Salle d’immatriculation des terrains domaniaux à la Maison du Foncier

Mais pour Houssen, les choses sont claires, «il y avait eu un morcellement cadial madame la présidente, et le droit commun s’appliquant, il a fallu recommencer». Une législation française qui, remettant les bornages à zéro, a permis de doter les héritières de la même surface que leurs homologue masculins de la famille, elles qui n’en recevaient que la moitié selon le partage du cadi…

Quant à l’argent perçu, il a été utilisé à une opération immobilière sur Petite-Terre. Le terrain est toujours en indivision, «le notaire nous demande 15.000€ et le géomètre 9.000€ !» se justifie Houssen. «C’est plutôt que les héritiers ne s’entendent pas», intervient Me Saïdal, essayant de stopper le flot de parole de l’accusé. Ce qui irritait un Me Hausser qui demandait que le temps de parole de chacun soit respecté.

Une clarté confuse

Le bâtonnier dans sa plaidoirie déclarait que le prévenu n’en était pas à son premier forfait, «il y aura d’autres plaintes !» Outre le remboursement des sommes déjà demandées selon lui dans le jugement d’appel, il réclamait 1.000€ de dommage et intérêts pour chacune des victimes, assortis d’un remboursement des frais de procédure de 500€.

Pour le procureur Michel Alik, «Houssen, c’est la confusion dans la clarté et la clarté dans la confusion!» Il assure avoir devant lui «plus qu’un directeur d’école, un véritable homme d’affaire !» Il demande donc une sanction-réparation : «il a six mois pour rembourser, sinon c’est la prison pendant 6 mois».

L’avocat de Houssen a la parole, il en profite pour démonter l’argument de l’escroquerie, «les frères et sœurs se seraient plaints si mon client n’avait pas eu les pouvoirs. Or, ils savent que chacun des héritiers a 1/12ème du terrain, soit 3.000m2 chacun, il n’a donc pas encore vendu totalement sa propre parcelle». Eric Hausser en profite pour informer que la valeur des terrains est plus proche de 100.000€ aujourd’hui que de 30.000€, et rappelle que le jugement au Civil n’avait décelé aucune faute, «pourquoi y aurait-il une faute au pénal ?» Enfin, il s’agissait d’une époque, pas lointaine, mais loin des normes administratives, «où un bout de papier et une signature suffisait pour une vente».

Cerise sur le gâteau, ou plutôt épine dans le pied, «la mairie de Bandraboua a installé un terrain de football au milieu de la propriété, ce qui ralentit le travail du géomètre»…

Le délibéré tombera le 19 mars, «après que vous nous ayez transmis l’arrêt du jugement d’appel», rappelait Viviane Peyrot au bâtonnier.

Houssen était déjà parti serrer les mains des juges de la Cour…

A.P-L.

*Prénom d’emprunt

Anne Perzohttps://lejournaldemayotte.yt
Anne PERZO Le journal de Mayotte https://lejournaldemayotte.yt

2 Commentaires

Comments are closed.

RESTONS EN CONTACT

Inscrivez-vous à la lettre d'information du JDM afin de garder en oeil sur l'actualité mahoraise

L'actualité

AVIS DE CONSTITUTION AUTO SHOP 976

139510
  Par acte SSP du 14/09/2022, il a été constitué une SAS dénommée : AUTO SHOP 976 Siège social : 25 Rue Bahoni 97615 Pamandzi Capital :...
+26
°
C
+27°
+24°
Mamoudzou
Samedi, 04
Dimanche
+25° +24°
Lundi
+25° +24°
Mardi
+25° +24°
Mercredi
+25° +24°
Jeudi
+25° +24°
Vendredi
+25° +24°
Prévisions sur 7 jours
Campagne, politique, Mayotte

Tribune – De l’art du discours à la formule

139510
Qui pour relever les défis de nos grands orateurs du passé ? Peu de noms émergent de la tribune de Madi Abdou N'tro, voire aucun, sur les dernières campagnes, laissant sans doute "un sentiment d'imposture" chez les électeurs

Départementales Sada : remaniements en vue au conseil départemental

139510
L’issue du scrutin a parlé : c’est donc le binôme Soula Saïd Souffou/Mariam Saïd Kalame qui intègre les bancs de l’assemblée départementale. Ce qui implique des réélections au menu du conseil départemental les jours prochains. Avec l’éventualité d’une refonte complète des vice-présidences, comme nous l’expliquons

Départementales partielles : Soula S. Souffou et Mariame S. Kalame élus avec 52,26% des voix

139510
Ils étaient en tête au premier tour, et ont creusé l’écart à l’issue du second : le binôme surprise Souffou/Kalame qui n’était pas présent sous cette configuration en 2021, est le nouveau duo d’élus qui intègre le conseil départemental.
Comores, Azali Assoumani

Comores : un ténor de l’opposition appelle à une désescalade politique

139510
L’ancien gouverneur de la Grande-Comores, Mouigni Baraka Said, estime qu’il est temps de dialoguer avec le président Azali Assoumani dans l’intérêt du pays et de la population. L’homme politique se reconnait toujours dans l’opposition mais s’oppose toutefois à "ces querelles sans fin et sans véritable perspectives de sortie de crise". Une démarche mal digérée par les autres opposants qui refusent tout dialogue avec le président Azali Assoumani depuis son élection le 24 mars 2019.
Départementale, Sada, Mayotte

Départementales partielles à Sada : Saïd Souffou-Mariam Kalame en tête

139510
Le 1er tour de l'élection partielle des conseillers départementaux du canton de Sada se tenait ce dimanche 25 septembre. Le canton est toujours scruté de prés pour être l'un des épicentres politiques locaux. Les élections...