Le tribunal demande un complément d’enquête avant de juger l’affaire des chiens battus à mort à Mtsapéré. Explications et retour sur les événements.
CARNET DE JUSTICE DU JDM. Plus de huit mois après les faits, l’affaire des chiens battus à mort à Mtsapéré continue de susciter les passions. L’ensemble des protagonistes de l’affaire avaient fait le déplacement au tribunal ce mardi après-midi, comme les associations «gueules d’amour» et la fondation Brigitte Bardot qui se sont portées partie civile dans ce dossier mais aussi des habitants du quartier… ainsi que l’intégralité des médias de Mayotte.
Tout le monde était venu pour écouter les arguments des uns et des autres mais tous vont devoir patienter pour connaître la décision de la justice. Le tribunal a en effet considéré que l’enquête devait être rouverte pour «une justice apaisée» qui dispose de l’ensemble des éléments, «pour que «ce dossier soit jugé en pleine connaissance de cause», va justifier le président Soubeyran.
Il faut dire que les affaires concernant les chiens sont souvent sensibles dans les villages. Et Mtsapéré n’échappe pas à la règle.
Les faits.
Les événements se sont déroulés à la fin du mois de février 2014. Un petit garçon de 3 ans se serait fait attaquer par deux chiens appartenant à une femme. Le père se précipite, la foule s’amasse. Finalement les chiens sont battus à mort. L’un d’eux est même décapité et son cadavre jeté dans la cour de sa propriétaire.
Quant aux deux autres protagonistes, ils sont à la fois prévenus et victimes présumés. Il s’agit de la propriétaire du chien, poursuivie pour blessures involontaires contre l’enfant mais également partie civile après la mort cruelle de ses animaux. Enfin, le père du petit garçon est mis en cause pour «sévices graves et acte de cruauté envers un animal domestique, apprivoisé ou captif.»
Pourquoi le report ?
L’affaire n’a pas été jugée ce mardi pour une raison précise : Me Kondé, l’avocat du père de l’enfant, a apporté de nombreux éléments visant à montrer que rien ne prouve que son client est responsable de la mort des chiens. Il a déposé pas moins de 14 récits de témoins directs des événements ou encore d’habitants du quartier. De ces témoignages, il ressortirait que personne n’est capable de dire qui a effectivement tué les animaux.
On y trouverait également des témoins qui expliqueraient que ces deux chiens avaient déjà eu des comportements violents et avaient causés des problèmes dans le quartier. Au final, ces éléments apportent des noms et des faits qui faisaient jusqu’à présent cruellement défaut dans cette enquête étonnamment vide, incapable d’aller au-delà d’un constat d’un «phénomène de foule».
Au moment des faits, trois policiers étaient pourtant présents sur les lieux mais aucun d’entre eux n’a été capable d’identifier un responsable.
Prochaine audience : le 20 janvier.
Me Kondé qui apporte ces éléments sera le seul à s’opposer à la réouverture de l’enquête. Pour lui, alors que le quartier est en voie d’apaisement, une nouvelle enquête serait de nature à recréer des tensions. Elle sera pourtant rouverte.
La justice donne donc trois mois aux enquêteurs pour se saisir des nouveaux éléments et tenter de définir des responsabilités, de nommer d’éventuels coupables ou complices… Bref, de présenter une enquête sérieuse dans une affaire où un enfant de trois ans est une victime présumée et où l’enjeu culturel de la présence des chiens dans nos villages est en question.
L’affaire sera finalement jugée le 20 janvier prochain.
RR
Le Journal de Mayotte
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