La peur d’une généralisation d’un phénomène de départ vers la Syrie d’une jeunesse qui se cherche, incite les cadis de Mayotte à réagir et à se rendre en métropole.
« La communauté mahoraise de Marseille ne sait plus comment faire avec ces jeunes qui veulent tous partir au front ! », commente El Mamouni Mohamed Nassur, chargé de l’avenir de la justice cadiale à Mayotte. La secousse qui touche la métropole déstabilise parents et entourage : plusieurs jeunes se sentent investi d’une mission, soit divine, soit de vengeance, mais sont le plus souvent seulement fascinés par la violence, comme le pense le politologue spécialiste de l’islam politique Olivier Roy.
L’implication d’un français dans l’exécution d’un otage américain avait fait l’effet d’une bombe, et révélé l’ampleur d’un phénomène : 1 132 Français seraient impliqués dans les filières jihadistes, selon le procureur de la République de Paris, ainsi que le rapporte le Huffington Post.
« Le jihad, ce n’est pas mourir en martyr ! »
La lettre qu’a reçue El Mamouni Mohamed Nassur de la Communauté mahoraise de Marseille l’a incité à réagir immédiatement : ils se rendra dans quelques jours en compagnie du grand Cadi et de trois autres religieux dans la capitale phocéenne pour y rencontrer les jeunes, « des mahorais comme des comoriens et des maghrébins, notre intervention doit toucher le plus de monde possible ».
Les religieux mahorais étaient déjà intervenus en février 2014 auprès des jeunes lors de leur voyage de sensibilisation après la profanation de la mosquée de Dzaoudzi-Labattoir. « Nous allons leur réexpliquer que le jihad, ce n’est pas mourir en martyr ». Loin de la connotation violente de « guerre sainte » pour les religieux, il s’agit plutôt d’un combat, intérieur et sur le plan social, pour « accomplir le bien ».
El Mamouni Mohamed Nassur ne le cache pas, c’est aussi une démarche de reconnaissance de leur rôle en vue de rédiger un nouveau statut des cadis à Mayotte où ils ont été mis sur la touche par l’arrivée du droit commun : « nous allons essayer de rencontrer le ministre de l’Intérieur dans cette logique et pour parler de lutte contre la radicalisation, la délinquance ou les violences urbaines. »
La délégation est attendue pour une conférence le 13 décembre à Marseille, « nous nous rendrons ensuite pour la même démarche à Lyon et Paris ».
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Marseille
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