La révolution qui s’opère sur la gestion des déchets laisse les utilisateurs, particuliers comme professionnels, dans le flou : peut-on aller jeter à la décharge comme auparavant ? Est-ce payant ? Sinon, à qui s’adresser ?
L’intervention du président de la Chambre de Commerce et d’Industrie, Ali Hamid, lors de la conférence sur l’économie circulaire vendredi dernier est à ce titre éloquent : « un de mes amis râle parce qu’on lui a dit qu’il fallait payer pour déposer ses déchets à la décharge Hamaha ! Si c’est la réglementation, elle n’est pas citoyenne pour lui parce qu’il va préférer tout jeter dans la nature ! ».
Et ce n’est rien au regard du témoignage de Damien qui n’a pu jeter ses encombrants plastique et métal dans la même décharge à Mamoudzou, « ‘les particuliers ne peuvent plus rien y jeter, faites en ce que vous voulez !’ m’a-t-on dit sans se soucier où je pourrais les déposer ». Son seul recours s’appelait Enzo Recyclage, mais c’est une société privée, dont les services sont théoriquement payants.
Nous avons donc contacté la société Star Mayotte chargée de la collecte, du traitement et de l’élimination des déchets, pour que sa directrice, Aurélie Loctin, nous aide à y voir plus clair.
Les professionnels doivent trier et payer
Pour les professionnels tout d’abord : « le dépôt de leurs déchets est désormais payant sur les quatre quais de transfert, Malamani, Hamaha, Badamiers et bientôt Kahani, qui ont remplacé les décharges ». Des déchets qui devront arrivés triés, puisque des filières de recyclages existent.
Mais certaines font défaut, comme l’indique le tableau consultable sur le site de l’Echo des filières qui donne également les tarifs. C’est le cas des déchets verts, ce qui oblige les entreprises à laisser partir pour l’unique décharge de l’île de déchets non dangereux (ISDND), des produits qui ne devraient pas s’y trouver.
Le dépôt payant, les professionnels ont du mal à l’accepter, « on est dans une phase de mutation de la pensée. Si le dépôt de déchets restait gratuit, ce serait la porte ouverte au gaspillage. Nous devons penser la production pour qu’il y ait ensuite le moins de déchets possible », rapporte Christel Thuret, Responsable de l’antenne mahoraise de l’Ademe (Agence de l’environnement et de la Maitrise de l’Energie).
Gratuit pour les particuliers
Les chefs d’entreprise ont ensuite tout loisir de répercuter cette charge supplémentaire à leur client. Il faut savoir que dans les autres DOM aussi le dépôt des déchets est facturé pour les professionnels.
Les particuliers ont la même difficulté de tri des déchets alors que seules trois bornes sont implantées, plastique, verre et métal. Le carton n’est toujours pas pris en charge. Et pour les gros déchets, les encombrants, c’est carrément la galère : aucune déchetterie n’a été implantée sur l’île alors que la réglementation en matière de traitement des déchets est appliquée. « C’est pour cela que nous acceptons malgré tout les déchets des particuliers aux anciennes décharges, et gratuitement », explique Aurélie Loctin qui déplore qu’un particulier ait été éconduit à Hamaha.
L’implantation d’une déchetterie, ces grosses bennes prêtes à recevoir les encombrants ciblés (cartons, bois…) présents en métropole, relève de la compétence du SIDEVAM 976, le tout jeune syndicat intercommunal, présidé par le maire de Koungou. La société privée Enzo recyclage a ouvert diverses filières comme cartons, cartouches d’encre, batteries, mais fait théoriquement payer ses prestations.
En attendant, les acteurs ne restent pas les bras ballants : « nous réfléchissons avec la Préfecture et le SIDEVAM à la mise en place de déchetteries destinées aux seuls particuliers, à proximité des quais de transfert », indique Aurélie Loctin.
En attendant que cette bonne nouvelle se concrétise, les déchets verts « doivent être déposés à côté des poubelles pour les particuliers », quant aux autres déchets comme les gravats, il n’y a actuellement pas de solutions…
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
Comments are closed.