Laurent Sabatier a officiellement été installé en tant que nouveau président du tribunal de grande instance de Mamoudzou devant l’ensemble des «autorités». Ce sont au total trois nouveaux magistrats qui ont officiellement pris leur fonction ce mardi matin.
Symboliquement, la justice de Mayotte est entrée dans une nouvelle phase ce mardi matin. Peu à peu, les personnalités qui ont travaillé à la départementalisation de la justice et donc à la création du tribunal de grande instance (TGI) de Mamoudzou cèdent la place. C’est le cas de Marie-Laure Piazza partie œuvrer en Corse et dont le successeur au poste de président du TGI de Mayotte, Laurent Sabatier, a été officiellement installé devant l’ensemble des «autorités» de notre département et au-delà puisque l’ensemble de l’institution judiciaire dans l’océan Indien était représenté.
Pour Laurent Sabatier, il s’agit de continuer les chantiers en cours et naturellement d’impulser l’énergie du nouvel arrivant sur d’autres, bref de «poursuivre la construction d’un véritable TGI à Mayotte», et pas seulement celui des nouveaux locaux en cours d’élévation à Kawéni.
Tribunal de commerce et accès au droit
Le premier chantier, c’est évidemment celui de la création d’un tribunal mixte de commerce après la réactivation «exponentielle» du RCS, le registre du commerce et des sociétés. Un conseil des prud’hommes va également voir le jour avec une juridiction composée de juges professionnels et non professionnels (échevinage).
Laurent Sabatier souhaite également renforcer les missions du CDAD, le conseil départemental de l’accès au droit particulièrement en direction des jeunes, en concertation avec la PJJ, la protection judiciaire de la jeunesse. Le point d’accès au droit pénitentiaire à Majicavo sera également développé.
Partenariat avec le conseil général
Des partenariats pourraient également voir le jour ou prendre une nouvelle dimension. Ce sera ainsi le cas avec l’Education nationale ou avec la mairie de Mamoudzou dont le maire, présent ce mardi matin au tribunal, souhaite développer des mairies annexes «pour favoriser l’effectivité du droit»… Et pourquoi pas avec le conseil général (CG) ? «Je suis partant, nous le sommes tous», indique le nouveau président qui rappelle, subrepticement, que la mission de protection de l’enfance est dévolue au CG.
Utiliser l’autorité des cadis
De ce discours d’installation, on retiendra également la main tendue de façon officielle aux cadis. Ils n’exercent plus la justice mais continuent à être une «autorité religieuse naturelle» que la population «respecte» et «écoute».
Cette «autorité morale», le président du tribunal veut la mettre «au service du lien social en collaboration avec la justice». L’invitation a été lancée pour «discuter des modalités de (leur) action éventuelle autour d’activités partagées sous forme de médiation sociale».
Deux autres magistrats
En même temps que le président du tribunal, une vice-présidente chargée des enfants, Carine Fontaine, et un vice-procureur de la République, Philippe Léonardo, ont également pris officiellement leurs fonctions, quelques semaines après leur arrivée. Ces trois magistrats en remplacent ainsi trois autres partis sous d’autres cieux parmi lesquels Véronique Compans devenue procureur adjoint à Grâce ou encore Hélène Bigot, la vice-procureur «partie voguer vers d’autres horizons au sens propre comme au sens figuré», selon les termes du procureur Joël Garrigue.
Ce mardi matin, Laurent Sabatier citait avec une certaine malice Abraham Lincoln : «les hommes naissent libres et égaux et c’est la dernière fois qu’ils le sont», une façon de rappeler les enjeux quotidiens d’une justice «gardienne des libertés individuelles» et de l’égalité, droit naturel imprescriptible de l’Homme ; une justice qui ne doit être «ni expéditive, ni irrationnelle», contrairement à la justice privée dont les «expéditions punitives (…) ne contribuent qu’à la satisfaction immédiate des pulsions de ses acteurs». Tenter d’éradiquer ces pulsions de justice populaire si courantes à Mayotte sera, sans nul doute, un autre des chantiers à mener.
RR
Le Journal de Mayotte
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