1000 euros. Voilà la peine à laquelle Abdou H. avait été condamné par le tribunal de police de Saint-Pierre. Le foundi a fait appel de cette décision et l’affaire a été abordée, à nouveau, ce jeudi matin par la chambre des appels correctionnels de La Réunion. La décision sera rendue le 26 mars.
Abdou H. n’est pas présent sur le banc des prévenus. Me Normane Omarjee, son avocat, est là pour porter sa parole. Abdou H. a été condamné en juin 2014 par le tribunal de police de Saint-Pierre pour une circoncision désastreuse, à 1.000 euros d’amende. Une première en France qui, si elle est confirmée en deuxième instance, constituera une jurisprudence jusqu’à maintenant favorable au prévenu. C’est pour cette raison que Me Omarjee a plaidé la relaxe.
Le 18 décembre 2012, l’homme, qualifié de foundi, a envoyé quatre enfants à l’hôpital après avoir pratiqué sur chacun une circoncision à l’aide d’un Opinel. Pour opérer, il s’était fait aider de trois hommes qui tenaient les enfants âgés entre 4 et 7 ans alors qu’il tranchait le prépuce. Après chaque acte, l’enfant était confié à une infirmière qui fournissait les pansements. Jusqu’à ce qu’elle signale un problème d’hémorragie sur un jeune. Le père des quatre enfants l’avait alors emmené jusqu’aux urgences.
“Ce n’est pas le procès de la circoncision”
Quand il était revenu, il avait appris que ses trois autres fils avaient été pris en charge par les pompiers. Des débuts d’infection avaient été constatés. Malgré tout, la famille n’a pas porté plainte contre le foundi dont la réputation en matière de circoncision n’est plus à faire à Mayotte.
Devant les policiers, l’homme âgé aujourd’hui de 56 ans a expliqué qu’il désinfectait entre chaque opération la lame de l’Opinel. Dans le cadre de l’enquête, le couteau a été montré à un responsable d’une mosquée comorienne du Port. Il a vivement réagi : “J’espère que ce n’est pas avec ce couteau qu’on a pratiqué la circoncision… Ca relève de l’obscurantisme.” C’est sur ces déclarations que Bruno Badré, avocat général, s’appuie précisant au passage : “Ce n’est pas le procès de la circoncision mais des conditions dans lesquelles celle-ci a été réalisée.” Il requiert la confirmation de la peine.
Une faute morale, pas pénale
Me Omarjee affirme : “La décision du premier juge n’est pas motivée juridiquement.” Le magistrat s’est basé sur les “draps souillés” pour montrer que les règles élémentaires n’avaient pas été respectées. Me Omrajee note aussi les éléments manquants : “Comment dans un dossier aussi sensible, l’infirmière n’est pas entendue.”
L’avocat continue : “Il aurait été plus sage d’entendre l’infirmière et le médecin que des responsables religieux. L’enquête n’a pas été faite dans les règles”. Pour le conseil sudiste “il est possible qu’il y ait une faute morale, une faute civile, mais pas de faute pénale.” L’affaire a été mise en délibéré.
Nicolas Goinard
Le Journal de l’île de La Réunion
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