Les deux infirmiers étaient suspectés de toucher des remboursements de la Sécurité sociale, « 7 fois supérieurs à la moyenne ». Le tribunal a été convaincu de leur culpabilité, les condamnant à restituer ces sommes et à un an de prison avec sursis.
Le délibéré de l’affaire jugée le 5 février et qui implique deux infirmiers suspectés d’avoir détourné des fonds au préjudice de la Sécurité sociale est tombé hier mercredi : le tribunal a suivi le procureur en les considérant coupables, et en les condamnant à un mois de prison avec sursis et à plusieurs peines d’amende.
Ce fut un long procès avec une avocate de la défense qui avait plaidé la nullité : Me Fatima Ousseni accusait une enquête à charge, empreinte de « déloyauté patente » pour avoir saisi les biens de ses clients « alors qu’une trentaine d’autres infirmiers sont également en difficulté avec la CSSM ». Des cas qui seront traités en leur temps, avait répondu le procureur.
On reprochait aux infirmiers, un homme et une femme, des abus de 129 299,58 euros pour l’une et 182 107 euros pour l’autre. Le jugement conservera d’ailleurs à la lettre, ou plutôt au centime prés, ces montants.
L’affaire avait été signalée en 2013 par la caisse de sécurité sociale de Mayotte (CSSM) qui avait jugé les montants reversés aux infirmiers exagérés, « des revenus 7 fois supérieurs à la moyenne ». L’enquête qui suivait le dépôt de plainte faisait ressortir quatre griefs : des falsifications d’ordonnances, une facturation majorée en heures de nuit indues, des frais de déplacement surestimés et le non-respect de cotation des actes.
Pas d’interdiction d’exercer
Les murs de la salle d’audience se souviennent encore des échanges hauts en décibels entre le procureur de Mayotte Joël Garrigue, et un des infirmiers.
Les ordonnances dont les dates étaient raturées étaient alors en discussion. Alors que le prévenu tentait de prouver qu’il s’agissait de patients suivis de longue date, le magistrat citait le témoignage du médecin, provoquant la colère du prévenu qui invoquait l’intimidation auprès du médecin, et un emploi qui le menait sur les routes dès 5 heures du matin, « je ne reste pas assis derrière une feuille toute la journée, moi ! », s’était-il écrié à l’adresse de l’homme de loi…
Le procureur avait relevé le détournement d’argent public, la multiplicité de manœuvres frauduleuses « comme la facturation anormale de prises de tension » et demandait pour chacun 1 an de prison avec sursis, avec conservation des saisies des biens personnels à hauteur du préjudice de la Caisse.
Les prévenus n’ayant rien de Bony and Clyde, le tribunal n’a pas prononcé d’interdiction d’exercer, mais l’année de prison avec sursis est désormais une épée de Damoclès en cas de récidive. Elle est assortie de trois années de mise à l’épreuve et d’obligation d’indemniser la caisse de sécurité sociale de Mayotte sur les montants déjà cités. Lui a été condamné à payer une amende de 40 000 euros alors que sa collègue devra s’acquitter de 30 000 euros.
Me Ousseni n’était pas en mesure ce jeudi d’indiquer si ses clients allaient faire appel.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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