Les conventions collectives nationales ne s’appliquent pas automatiquement à Mayotte. Il va donc falloir apprendre à négocier. C’est l’objet des grèves qui se généralisent dans le secteur privé.
Les nombreux conflits sociaux BFC OI, SMAE, SFR que traverse le territoire semblent tous tourner autour de trois mots, « l’application des conventions collectives ».
Les conventions collectives nationales (CCN), sont des accords négociés entre les organisations professionnelles d’employeurs et les organisations syndicales représentatives des salariés. Elles complètent le Code du travail en apportant des garanties sociales aux salariés concernant leurs conditions de travail et d’emploi. Ces derniers veillent donc sur les avancées susceptibles de les intéresser. Il y a en France plus de 300 conventions collectives.
Mais à Mayotte, elles ne s’appliquent pas automatiquement. Le Code du travail qui comprend entre autres le contrat de travail, l’hygiène, les congés, les salaires, la classification, le licenciement, n’est en effet pas le même qu’en métropole ou que dans les autres DOM. C’est ce point précis qui pose problème.
Les avancées sociales dans chaque branche doivent donc être issues d’une négociation entre partenaires sociaux. Chez Total ou Somagaz par exemple, ce dialogue entre syndicats et dirigeants, a permis d’aboutir à une transposition locale des conventions
Transformer le Code du travail
De même, la réécriture de la convention collective d’entreprises du Bâtiment et travaux publics en 2014 a permis son extension à l’ensemble du secteur du BTP par le préfet de Mayotte.
Dans le conflit SFR en cours, les salariés revendiquent l’application de la convention collective avec une grille des salaires identique à celle de leurs homologues réunionnais. Ils citent en exemple leurs concurrents mahorais, Orange et Only, bénéficiaires de conventions collectives. « C’est une application volontaire de la part des dirigeants de ces enseignes comme cela s’est passé pour le secteur bancaire », explique Monique Grimaldi, directrice de la Dieccte (Direction des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi).
La direction de SFR a donc toute latitude de mettre en place une application volontaire identique, ou parvenir à un accord sur des conventions collectives locales avec l’intersyndicale CFDT-CFE CGC-UNSA.
Rien n’empêche donc les partenaires sociaux de se réunir, « ils n’ont d’ailleurs pas besoin de la Dieccte, une Direction des ressources humaines ou les conseils d’un avocat suffisent », complète Monique Grimaldi. Le service de l’Etat est actuellement sur tous les fronts avec un personnel restreint.
Le plus simple serait de transformer le code du travail comme ce fut le cas pour les autres DOM. Mais beaucoup d’avancées manquent à l’appel pour cela : les régimes de prévoyance, les complémentaires santé ou les retraites complémentaires… Le risque de déstabiliser l’économie est toujours invoqué, avec en toile de fond, les craintes d’appel d’air depuis les îles comoriennes.
Pour l’instant, aucune avancée n’est annoncée depuis Paris, et le document-cadre Mayotte 2025 devrait justement permettre de débroussailler le terrain.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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