Bien qu’encore insuffisantes au regard des besoins, chaque année l’Etat consacre des sommes importantes pour les constructions scolaires. D’autres difficultés se font sentir comme l’exprimait Roukia Lahadji, la maire de Chirongui qui accueillait les ministres.
C’est face à un soleil de plomb et une Roukia Lahadji en grande forme que le Premier ministre Manuel Valls, la ministre de l’Education Najat Vallaud-Belkacem et la ministre des Outre-mer George Pau-Langevin ont inauguré le réfectoire du groupe scolaire de Poroani.
Il s’agissait surtout de faire un point sur les constructions scolaires pour lesquelles l’Etat a versé 14 millions d’euros en 2014 et 10 millions d’euros cette année, et désormais directement versés aux maires. Un rattrapage essentiel à l’image des chantiers qu’aura menés la maire de Chirongui qui pouvait annoncer à la ministre de l’Education nationale une mise en place de la réforme des rythmes scolaires dans deux établissements supplémentaires qui ne sont donc plus concernés par les surcharges de classes.
Roukia Lahadji apportait sa touche locale à la réforme, en réitérant sa demande « d’un partenariat fort avec nos madrassas sur le temps périscolaire ».
La maire n’avait pas oublié son franc parler en s’adressant au premier ministre droit dans les yeux, avec passion, surtout quand il s’agit d’évoquer la difficulté majeure de l’île, l’insécurité : « monsieur le ministre, il faut agir très rapidement et notre police municipale doublée du Conseil supérieur de prévention de la délinquance ne suffit pas, il faut des moyens supplémentaires, notamment humains », revenant donc sur les propos de Manuel Valls qui avait annoncé les CLSPD comme une des réponses clefs à la délinquance.
« Vous pouvez m’applaudir ! »
En réponse Manuel Valls est revenu sur l’effort de l’Etat pour un département qui comptait seulement une centaine de scolaires en 1973, contre 87.000 aujourd’hui, « et d’ici 2025, ce seront 100 millions d’euros que l’Etat aura versé pour ses écoles ». Malgré la croissance démographique et les arrivées des îles voisines, les rotations aussi seraient moins nombreuses, « la moitié des classes il y a dix ans, 25% aujourd’hui ».
«Vous pouvez m’applaudir!»… le Premier ministre se décontractait sur le mode d’Ibrahim Aboubacar qui relançait régulièrement la foule en applaudissements lors de son discours, se félicitant de la mise en place de la loi Peillon, « première grande loi scolaire de la République ici. Si en métropole on refonde l’école, à Mayotte on la fonde tout court », glissait le député.
Avec une agriculture en devenir et qui nécessite de former les jeunes, c’est le lycée agricole qui accueillait les ministres. L’atelier-relai tout d’abord, sorte de couveuse qui permet aux jeunes de se lancer et de créer ensuite leurs propres outils, moyennant une participation de 90 euros par jour.
Debout dès 3 heures du matin
Le maire de Ouangani Ahmed Combo faisait remarquer que l’île ne se dotait pas des moyens de ses ambitions avec un seul lycée agricole pour toute l’île, « certains élèves se lèvent à 3 heures du matin ! »
Manuel Valls annonçait en réponse la création d’un internat mixte de 80 élèves pour un montant de 5 millions d’euros, « il le faut pour cet établissement exemplaire, à la hauteur des besoins en développement de l’île ». Le Premier ministre rappelait que le Programme de développement rural de Mayotte était le premier à avoir été adopté, « il doit aider les filières agricoles à se structurer, mais en retour, il faut être irréprochable sur la consommation de fonds européens ».
Il relevait par exemple le manque d’organisation actuel, « un seul abattoir légal pour 200 poulets, qui vous oblige à importer alors que c’est votre repas habituel ». Le ministre rappelait des chiffres qui témoignent de l’état embryonnaire de l’agriculture : « 1% des exploitations sont munies d’équipements agricoles, un tiers seulement commercialisent leurs exploitations. »
Deux autres internats sont également annoncés, l’un à Kawéni l’autre à Dzoumogné.
Entretemps, le premier ministre aura dégusté des chips de manioc et de songe et siroté un jus d’orange-papaye, le tout produit par des agriculteurs locaux.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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