Le changement de cap du conseil départemental, les associations en charge des mineurs ne demandent qu’à y croire. Elles délivrent même silencieusement un premier satisfecit à Issa Abdou, le 4e vice-président du département en charge du social, pour ses premières actions.
Elles en avaient bien besoin les associations de cette bouffée d’air frais : à force d’agir au quotidien, et sans trop de reconnaissance, pour éviter le pire à ces mineurs de la rue, pouvoir compter sur le conseil départemental n’est pas un luxe. Mais le doute persiste : « on nous a tellement parlé du Schéma départemental de l’enfance que nous attendons que cela soit suivi des faits », relate l’une d’entre elles.
Le travail ce jeudi matin dans le cadre de l’OPEMA, l’Observatoire départemental de la protection de l’enfance de Mayotte, avec tous les acteurs du social, des associations, en passant par le procureur, aux services de la Direction de la Santé et du Développement social (DSDS), et au vice-président Issa Abdou, en charge de la Santé et du social, avait donc essentiellement pour but de redonner confiance, de (re)tisser des liens en normalisant les relations, et de dresser un constat : « il faut que nous soyons crédibles », dixit l’élu.
Une crédibilité dont ont besoin les associations d’abord pour pouvoir être habilitées et accréditées, afin d’assurer leurs missions dans un cadre réglementaire et les faire financer, par l’Etat et, à terme, le département.
« Tiers dignes de confiance »
Mais une crédibilité aussi envers les partenaires financiers du département, l’Etat et l’Union européenne. Les trois propositions du schéma ont déjà été détaillés par Issa Abdou auprès du Défenseur des Droits Jacques Toubon : accroître le nombre de familles d’accueil, habiliter les associations tout en recrutant des partenaires sociaux et proposer un foyer pour ces enfants des rues. Conçu pour 30 enfants, il pourrait être financé par l’Europe, mais se pose toujours le problème d’en assumer le fonctionnement, « le Schéma de l’enfance devra répondre à ce point ».
Il s’est rajouté une quatrième proposition depuis, « qui emboite le pas d’une feuille de route ministérielle à propos du dispositif des ‘tiers dignes de confiance*’. Nous comptons sur nos parlementaires pour argumenter en faveur de leur application à Mayotte », glisse Issa Abdou.
Un lieu d’échanges, parfois virulents, notamment entre le procureur et le DGA du social, mais nécessaires : « le vice-rectorat a très justement fait remarquer que le conseil départemental est le premier responsable de ces enfants en danger, mais j’ai de mon côté interrogé sur la déscolarisation de ces jeunes », appuie le vice-président.
« Mauvais en signalement »
Issa Abdou le sait, il n’a même pas à l’avouer haut et fort, « nous sommes mauvais en signalement, alors que nous devrions être les premiers à le faire. » Mais les chiffres parlent pour lui : comment être efficace avec une vingtaine d’assistantes sociales « là où il en faudrait 200 à 300. »
Outre le manque de moyens, alors que la population à prendre en charge est du domaine régalien de l’immigration clandestine, le conseil, alors général, a pêché surtout par inaction, et la désorganisation interne qui s’en est suivie est ensuite difficile à rattraper. « C’est aussi pour cela que j’ai saisi l’Inspection générale des affaires sociales, pour qu’elle propose des solutions, et l’Aide sociale à l’enfance, l’ASE, en est une », indique l’élu.
Les acteurs qui se penchent sur l’enfance en danger ont donc consacré leur matinée à décrire cette réalité, « une triste réalité pour nous département », et a lancer une nouvelle organisation.
Issa Abdou reprend son bâton de maréchal pour retrouver la ministre Pau-Langevin le 10 septembre, « une suite de sa visite avec le premier ministre », et aura auparavant rencontré le vice-président du conseil départemental réunionnais en charge des affaires sociales, « pour concerter nos actions ».
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
*Personne (membre de la famille ou pas) à qui le juge des enfants confie le recueil et l’éducation de l’enfant, à titre exceptionnel
Comments are closed.