Un site d’information du Venezuela fait connaître Mayotte à l’Amérique du Sud d’une façon assez inattendue. Il détaille les chiffres improbables du gouvernement du pays: Mayotte y aurait exporté pour des milliards de dollars jusqu’en 2006!
Au Venezuela, à 12.527 km de chez nous, probablement personne ne connaissait Mayotte. Cette grande injustice vient heureusement d’être réparée mais d’une drôle de façon. El Cambur, un site internet d’information du pays, s’est penché sur les chiffres du commerce extérieur vénézuéliens publiés par le très officiel Institut national de la statistique. Nous y apprenons que, fut un temps, Mayotte était un champion du commerce mondial. Grâce à nos exportations d’ylang ylang, de vanille, de coprah, de noix de coco et même… de café ou de cannelle, nous aurions vendu pour des milliards de produits à ce pays sud-américain.
«Malgré une petite économie, en 1998, Mayotte a vendu au Venezuela plus de 610M$», explique le site. Cette année-là, nous étions le 6e plus grand exportateur au monde vers le pays ! Et ce n’est pas tout : notre balance commerciale vers le pays n’aurait cessé de grimper. Les chiffres officiels du gouvernement vénézuélien sont formels : en 2006, grâce à notre agriculture, nous avons exporté pour 1,9 milliard de dollars !
Une déroute économique (imaginaire)
Depuis, malheureusement, nous avons connu une véritable déroute économique si on en croit les statistiques vénézuéliennes. En 2007, nos exportations vers ce pays sont en effet effondrées ne représentant plus que… 9.900 dollars. Une catastrophe financière pour notre petite île.
Tout ceci ressemble à un poisson d’avril au milieu du mois de juillet mais les statistiques, compulsées par le JDM, sont bel et bien réelles. Chez nous, pourtant, personne ne se souvient de cette production agricole hyper intensive qui aurait disparu depuis.
Au risque de décevoir le Venezuela, nos statistiques tenues par l’IEDOM (Institut d’émission des départements d’Outre-mer, l’antenne de la Banque de France à Mayotte) font apparaître une toute autre réalité.
Des exportations 30 fois plus faibles
En 2006, tous commerces cumulés, nous avons exporté pour… 5,8 millions d’euros, essentiellement de l’ylang et de la réexportation vers les Comores voisines. Concernant la vanille, «les exportations tendent à disparaître», notait alors l’IEDOM, «après avoir atteint un montant de 192.000 euros (1,2 tonne) en 2003».
Quant aux destinations de nos exportations, il s’agissait des Comores (1,5 million € en 2006 soit 70,3% du total) suivies de La Réunion (22,6 %) et Madagascar (6,3 %). Bref, pas de traces du Venezuela et encore moins de milliards de dollars.
El Cambur note, perfidement, que nous ne sommes pas les seuls concernés par des chiffres particulièrement étonnants. «Beaucoup d’autres petits pays qui ont vendu des quantités importantes au Venezuela, comme la Jamaïque ou la Palestine, ont aussi cessé de le faire depuis 2007».
Mayotte et la Palestine mais aussi les Îles Féroé ou l’Irak, supplantés par les Etats-Unis et la Chine dans le commerce mondial… Bien entendu, il y aurait de quoi sourire si, des années après, le Venezuela ne semblait continuer à jouer avec ses chiffres officiels.
Une déroute économique (bien réelle)
Le pays connaît, en effet, une (réelle) déroute économique à laquelle nos confrères du Monde consacraient un article ces derniers jours. Avec une inflation qui «dépassera en 2015 la barre des 100 %», la Banque centrale du Venezuela (BCV) ne publie plus de chiffres. «En février, l’organisme annonçait que l’inflation avait atteint, en 2014, 68,5 % et la récession 4 %. Depuis, silence radio», note Le Monde. La chute des cours du pétrole qui constitue 95% de ses exportations et des taux de change bloqués ont précipité le pays dans une lourde crise, faite de pénuries.
Alors, peut-être, que cette découverte incongrue de Mayotte aura, un peu, changé les idées de Vénézuéliens. Amis qui nous lisez depuis Caracas ou Ciudad Bolivar, sachez que vous êtes les bienvenus à Mayotte pour profiter des senteurs de l’ylang et d’une des meilleures vanilles du monde. Mais pour le café, qui n’a probablement jamais été produit sur notre île tropicale, il faudra vous contenter de celui que nous importons… entre autres du Venezuela.
RR
Le Journal de Mayotte
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