George Pau-Langevin et Marie-Thérèse Geffroy, la présidente de l’Agence Nationale de Lutte contre l’Illettrisme (ANLCI) ont signé ce mardi 6 octobre un partenariat. Objectif : s’attaquer à l’illettrisme, un des fléaux des Outre-mer. Pour Mayotte, des objectifs concrets et précis.
Cette convention de partenariat entre le ministère des Outre-mer (MOM) et l’ANLCI attaque de front une situation jugée «préoccupante» pour l’ensemble des DOM… Un euphémisme pour Mayotte où une enquête menée par l’INSEE et Opcalia fait apparaître un taux de 58% de la population touchée par l’illettrisme (connaissance insuffisante de l’écrit) et même 39% par l’analphabétisme (incapacité complète à lire et à écrire). Dans le détail, l’illettrisme toucherait 50% des demandeurs d’emploi et 62% des salariés (27% seraient analphabètes).
L’objectif du partenariat est double : améliorer les conditions d’accompagnement et réduire de manière significative le nombre d’ultramarins (jeunes comme adultes) en situation d’illettrisme. George Pau-Langevin «a beaucoup insisté sur l’importance de la mobilisation collective de tous les acteurs publics ainsi que des partenaires sociaux et des entreprises», précise le ministère. Et de fait, pour Mayotte, le plan d’actions est ambitieux.
Il est issu d’une vaste consultation et a été présenté à la commission de lutte contre l’illettrisme et l’analphabétisme (CLIA) le 28 septembre dernier au département. Les nombreux partenaires impliqués dans son élaboration se sont arrêtés sur 10 axes qui vont commencer à être déclinés avant la fin de l’année, sur une durée de 5 ans.
De qui parle-t-on ?
Il s’agit d’abord d’affiner le diagnostic et de favoriser la recherche. Car les chiffres disponibles «ne permettent pas de connaitre avec précision l’ensemble des besoins et des caractéristiques de la population en matière de maîtrise des savoirs de base», note le plan d’action. Le diagnostic portera aussi bien sur les zones géographiques que sur les personnes (emploi, statut, salariés, chômeurs…). Le plan lance des indicateurs annuels pour connaître les évolutions et ainsi permettre des bilans des actions menées.
Le volet recherche concernera les questions liées aux apprentissages linguistiques propres au contexte mahorais et sur la question des enseignements traditionnels.
Une question de méthodes
Le plan se focalise également sur le repérage des personnes concernées ou encore la mobilisation d’acteurs locaux et des communes pour des formations fléchées sur des territoires. L’objectif est, par exemple, d’identifier 50 référents illettrisme dans le département et d’accompagner au moins 5 organisations pour doter Mayotte des outils à destination des différents publics-cibles et proposer des dispositifs adaptés.
Logiquement, le plan veut recenser les méthodes déjà utilisées. Un groupe de travail dédié à «l’ingénierie pédagogique» produira et expérimentera aussi des ressources pédagogiques, là encore, adaptées aux acquis des apprenants. Avec ces outils, des pratiques harmonisées doivent pouvoir être diffusées sur tout le territoire.
Professionnalisation et qualification des intervenants, échanges de pratiques, utilisation d’outils collaboratifs… La plateforme détaille et précise toutes les étapes, toutes les démarches avec des actions dont la fréquence est posée. Autrement dit, ce plan fixe des objectifs et des indicateurs. On sait ainsi que 30 formateurs doivent labélisés en 2020.
5.126 bénéficiaires en 2020
Quant au nombre de personnes illettrées que le plan ambitionne de toucher, l’objectif est de dépasser les 5.000 participants engagés dans des actions de formation en 2020 avec une montée en puissance. Les dispositifs concerneraient par exemple 1.900 personnes dès l’an prochain, 3.000 en 2017, 4.200 en 2018… et donc 5.126 en 2020.
Le détail du nombre de bénéficiaires parmi les demandeurs d’emploi, les salariés du secteur public, du secteur privé, les artisans et commerçants et le grand public est également prévu, car les organismes financeurs des formations sont aussi désignés : DIECCTE, CSSM, DJSCS, politique de la ville, OFII, CNFPT, Opcalia et les fonds européens (FSE).
Si le ministère rappelle que cette politique de lutte contre l’illettrisme «s’inscrit dans le cadre des priorités nationales engagées par le gouvernement», elle tombe aussi à un moment où les communes ont signé leur contrat de ville (hier encore à Sada) dans lesquels la cohésion sociale est souvent placée au cœur des projets. Au ministère de l’Outre-mer, on le sait bien. Car l’ancienne sous-préfète Sylvie Espécier qui avait mené le chantier des contrats de ville et désormais au MOM… Et ce sujet est très largement passé par son bureau.
RR
Le Journal de Mayotte
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