Pour savoir combien il y avait de manifestants aujourd’hui, il fallait compter le nombre de parapluie et multiplier par deux ! Ce qui n’a pas ému enseignants et parents d’élèves du collège de Chiconi qui avaient bravé des éléments beaucoup plus déchaînés pour leur marche lundi dernier dans le sud, comme le montre le clip qu’ils ont tournés.
Ils étaient nombreux, environ 600, les parents d’élèves et les enseignants à s’être rassemblé place de la République à 13h30. Les banderoles étaient massivement brandies, suffisamment éloquentes : « Bassi la violence » (stop à a violence), « Donnez-nous des moyens humains pour faire face », « Enseigner sans saigner »…
Il faut dire que la cause était partagée : même les maternelles avaient fait le déplacement. C’était le cas de l’école publique Jardin fleuri, à Cavani : « Trois voitures ont été cassées sur le parking de l’école, des autoradios volés, et trois enseignantes se sont faits agresser. Lorsque nous sortons à 17h45, nous ne sommes pas rassurées, car en saison sèche, il fait presque nuit », indique la directrice qui a appelé les polices municipale et nationale, « mais ils sont débordés. Ça nous sécuriserait s’ils pouvaient faire des rondes à cette heure là. »
Deux mamans tiennent une banderole : « Les mamans de Kahani sont fatiguées par la violence au collège », elles parlent à peine français mais nous font comprendre que leurs enfants en 5ème2, ont été victimes de violence.
Les enseignants du second degré du SNES sont aux anges face à cette mobilisation, « tous les autocollants sont partis », savoure Thierry Wuilliez qui, de concert avec Thomas Amigou, enseignant au collège de Chiconi, donne le programme de l’après-midi : « Nous partons pour une marche qui passera par le vice-rectorat, pour terminer par la préfecture où nous sommes reçus à 16h. »
Ils avaient déjà eu un échange au vice-rectorat vendredi dernier, mais ils ne sont pas satisfaits : « La vice-recteur pointe la responsabilité des parents et l’implication des équipes pédagogiques », quand ils demandent eux, des moyens matériels et humains. Des parents accusés néanmoins de ne plus avoir d’autorité sur leurs enfants, selon les cadis de Mayotte qui proposent d’aborder ces problèmes de société le 23 février lors d’une Journée d’alerte à l’explosion sociale.
56 surveillants supplémentaires
Quant aux enseignants, ils ne nient pas un rapport de force avec le principal de Chiconi, mais le problème dépasse de toute manière ce cadre. Le sous-préfet Bruno André avait en effet indiqué qu’il fallait sanctuariser les établissements scolaires, n’étant pas concevable que les élèves puissent aller en cours et étudier en se sentant menacés.
Thomas Amigou, nous apprend que l’Education nationale a prévu 56 postes de surveillants supplémentaires à la prochaine rentrée pour les 30 établissements du secondaire, « dont 20 collèges classés en REP+ qui devraient bénéficier d’effectifs renforcés. En plus, c’est maintenant que nous avons besoin de renfort. »
En regardant vers les actions qui ont porté leurs fruits, on peut citer le collège K1 où des intrusions de jeunes avaient provoqué l’année dernières des droits de retrait identiques à ceux que pratiquent les profs de Chiconi : « Un mur a été construit qui protège des intrusions, et les parents d’élèves se relaient à l’intérieur du collège pour surveiller la distribution de la collation », relate un enseignant.
Moyens humains, moyens matériels, implication des enseignants et des parents, des élus communaux et départementaux, des services de l’Etat, et de la justice comme du vice-rectorat, « Il faut s’y mettre tous », avait appelé le sous-préfet Bruno André.
Parents et enseignants sont actuellement reçu à la préfecture.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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