Bonne nouvelle pour l’équipe sur place : « l’essentiel du projet scientifique et culturel du Musée a été adopté », lance d’entrée Michel Colardelle, le président du Conseil scientifique du MuMa. Un de ses membres, tous d’illustres chercheurs, est même enthousiaste sur la préfiguration actuelle du musée : « Nous ne sommes plus au stade de réflexion comme il y a quatre ans lorsque nous étions venus pour former les équipes sur place, mais sur une phase concrète et de belle qualité », se réjouit François Hubert, Directeur du Musée d’Aquitaine, après avoir visité le MuMa à la Caserne de Petite Terre.
Ils ont évoqué les sujets des prochaines expositions : les plantes médiévales, les migrations de population, le métissage, le baobab, le cocotier, « nous avons des idées pour les 20 ans à venir ! » Cette année, ce sera la pêche et le lagon, « pour rester en lien avec le Parc marin et la demande de classement du lagon à l’UNESCO », en l’élargissant aux échanges commerciaux, culturels et religieux liés à la mer.
De l’implication naît la décision
Des sujets conseillés par les deux comités, d’honneur, et scientifique, « mais c’est l’équipe locale de Ben Said Abdoulkarim, sous l’autorité administrative du conseil départemental, qui décide. » Justement, l’inquiétude de ces hommes et femmes, conservateurs ou spécialistes dans leurs domaines, c’est « le circuit de décision au sein de la collectivité », en citant l’exemple d’un ordre de service qui a mis 5 mois pour être rendu !
Toihir Youssoupha, en charge de la culture au département, se veut rassurant évoque l’engagement de l’équipe actuelle et les moyens mis à disposition, il faudra notamment un véhicule pour aller collecter les éléments nécessaires aux expositions : « Nous avons compris que le musée doit avoir une autonomie d’action. »
« 8 ans pour que tout soit bouclé »
Un projet réalisé grâce à un fort partenariat avec l’Etat, comme le rappelle Florence Gendrier qui succède à Clothilde Kasten à la tête de la Direction des Affaires culturelles à la préfecture, et qui espère elle aussi apporter des moyens : « Nous avons besoin de ressources humaines pour accompagner la maîtrise d’ouvrage. » Le ministère de la Culture suit, selon Michel Colardelle : « C’est la première fois que ce ministère met à disposition un Conservateur en chef pour accompagner la création du musée. »
Avant que le musée soit livré, il va falloir rénover l’ancienne résidence du gouverneur et la caserne : « Le cabinet Prevost qui en a la charge a reçu l’accord pour les étude et le démarrage de travaux d’urgence. On envisage 8 ans de délai pour que tout soit bouclé, cela ne sert à rien d’aller au pas de charge pour entrer dans un mur », pour Michel Colardelle.
Pour ne pas perdre son âme
Un musée qui apporte une notion de patrimoine à conserver, peu répandue sur une île où la tradition inciterait à parler aussi de « matrimoine » : « Le patrimoine était à Mayotte comme ailleurs, en quelque sorte naturel, il ne faisait pas l’objet d’une attention particulière », relatait le président du département Soibahadine Ibrahim Ramadani lorsqu’il a accueilli la mission.
Qui expliquait qu’on en attend donc beaucoup parce qu’il fige la culture mahoraise dans un lieu : « les effets de la mondialisation économique et culturelle qui présente beaucoup de conséquences positives, n’en sont pas moins destructeurs d’un mode de vie qui se transforme au risque de faire perdre son âme à notre société et ses capacités de fraternité, d’adaptation et de dynamisme. »
Il représente donc un fort enjeu éducatif, notamment pour les scolaires, comme en témoigne la présence de l’Inspecteur académique. Le vice-rectorat a donné son accord pour la mise à disposition d’un professeur relai.
« Nous sommes passés en quatre ans d’un projet de musée local à celui d’un grand département », concluait le directeur du Musée d’Aquitaine.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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