A chaque brigade de gendarmerie, son «chimiste». Les 14 personnes interpellées hier lundi ont passé une première en nuit en garde à vue, réparties dans l’ensemble des brigades du département. Elles auraient même pu être au nombre de 15 mais un dernier individu est parvenu à passer entre les mailles de l’opération menées par les forces de l’ordre, sur commission rogatoire de la juge d’instruction Sylvie Roy.
A partir de demain mardi, ils seront donc 14 à passer les uns après les autres dans le bureau de la juge qui devrait leur signifier leur mise en examen et décider d’éventuels placements en détention provisoire. Les principaux organisateurs de ce trafic ne devraient probablement pas y échapper. Car les investigations sont loin d’être finies autour de ce qui se présente comme un véritable réseau, assez classique en matière de stupéfiants.
Au sommet, des personnes qui s’approvisionnent et qui mettent en place une structure pyramidale pour écouler la marchandise… Et quelle marchandise !
Des effets dévastateurs
La chimique, c’est cette poudre blanche qui est consommée associée à du tabac. Elle arrive de Chine et les achats se feraient par internet. A la revente, le gramme n’est vendu que quelques euros, d’où le succès fulgurant du produit… fulgurant comme ses effets.
Le Dr Ali Mohamed Youssouf expliquait au JDM les sensations extrêmes que provoque le produit il y a quelques mois : un bien-être intense au point de renoncer à partager sa vie avec ses proches, mais aussi, à l’opposé, des réactions hyper-violentes et incontrôlables.
Pour le procureur Joël Garrigue, pas de doute : l’explosion de violence que nous connaissons est en grande partie liée à l’apparition de cette substance. Nous sommes en effet passés de 1.500 faits de violence enregistrés en 2013, à 1.978 en 2014 puis 2.900 en 2015.
Une métropolitaine
Ce type de réseau, aussi structuré, est rare à Mayotte. L’essentiel du trafic de stupéfiant tourne en effet autour du bangué et n’a pas besoin d’une organisation imaginée aussi finement. Ce réseau ressemble pourtant à un autre, démantelé en juin 2014. Là encore, la drogue était livrée par voie postale. Parmi les personnes actuellement en garde à vue, on retrouverait d’ailleurs plusieurs individus impliqués dans le réseau de 2014.
Mais la particularité de la petite organisation qui occupe actuellement les enquêteurs, c’est le visage de celui, ou plutôt de celle qui en serait au sommet. Il s’agirait d’une métropolitaine âgée d’une quarantaine d’années.
Sur écoute
Elle était sous surveillance depuis de longs mois comme la plupart de ses acolytes et même placée sur écoute téléphonique. Les enquêteurs cherchaient à comprendre qui trafiquait quoi et à quel endroit. La quantité des drogues écoulées et les sommes d’argent en jeu seraient encore à préciser.
«Ce type d’interpellation est toujours satisfaisant parce que ça fait longtemps que ce produit circule et qu’on ne peut pas se résoudre à regarder ses effets désastreux. Passée cette première phase, j’espère que les individus impliqués seront mis hors d’état de nuire», affirme le procureur Joël Garrigue au JDM. Pour autant, il ne se fait pas d’illusion. «En matière de stupéfiants, la nature a horreur du vide et je sais que d’autres suivront. Mais il est important de rappeler qu’on ne laissera pas faire».
RR
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