On ne va pas revenir sur la situation d’une forte démographie, locale et issue de migration, débouchant sur une population de jeunes mineurs, vivant à la fois une attirance de la société de consommation, et un recul de la religion, « laissant apparaître des comportements nouveaux (alcoolisme, drogue, chimique, mangrove) qui influent sur les nouvelles formes de la délinquance juvénile. »
La concentration des étrangers en situation irrégulière « dans certains quartiers où règne en ce moment même une urbanisation sauvage (habitat précaire, construction des bangas en tôles) », pose un problème d’intégration selon Chaharoumani Chamassi, et, « sans être véritablement des zones de non droit, ces quartiers constituent, en particulier la nuit, des terrains aux conditions d’intervention difficiles. Le sentiment d’impunité s’y développe et on a vu en 2011, lors des évènements sociaux liés à la vie chère, des centaines de jeunes s’essayer à la guérilla urbaine avec succès. »
Le policier évoque dans sa lettre “A ceux qui ont le pouvoir de décider” un enchevêtrement de facteurs aggravant : « le tissu associatif très distendu, certains élus locaux déresponsabilisés, la perte d’influence des anciens garants de l’autorité (cadis, fundis, bouenis), auprès des jeunes fragilise le climat social de ces quartiers, qui peuvent voir éclater une explosion de violence sans rapport avec l’objet initial du mécontentement », comme on l’a vu à Tsoundzou 1 récemment, provoquant un décès.
« Pas d’anticipation des politiques de sécurité »
De plus, les caractéristiques urbaines de Mamoudzou compliquent l’exercice des misions de sécurité publique, « par l’étirement de la zone urbaine le long du littoral très allongée dans le sens nord-sud » et « peu d’éclairage public : la plus grande partie de la commune est plongée dès 18h dans l’obscurité ».
Un état de fait qui n’a pas été anticipé en matière de politique de sécurité : « Les efforts en cours et à venir de recrutement et d’équipements ne rattraperont que difficilement le décalage entre la demande sociale de sécurité et la prestation offerte. Pour autant, la relation police-population reste dominée par une forme de sérénité et de respect mutuel, mais pour combien de temps ?! »
Des solutions, il en a, une dizaine même : « Développer l’éclairage public et les infrastructures routières, Renforcer les effectifs de la justice, et ceux de la police nationale et de la gendarmerie en les stabilisant sur place en leur proposant notamment des véhicules aux vitres renforcées et protégées, Créer une compagnie départementale d’intervention (demande qui date depuis 1996), une police de proximité, Utiliser sur le terrain des policiers en civil, en binôme avec ceux venus de Métropole pour déstabiliser et surprendre les délinquants, Privilégier les concours déconcentrés, Mayotte mériterait d’être classée en zone de sécurité prioritaire, mais vu l’urgence qui s’impose, il faut parallèlement améliorer l’existant. »
Un centre éducatif fermé
En ce qui concerne les mineurs, il invite à mettre en place un vrai centre éducatif fermé en formant les jeunes professionnellement pour obtenir des (CAP, BEP en maçonnerie, électricien, plomberie etc ..) ou vers une reprise de circuit scolaire : « Cela peut se faire facilement en transformant les anciens bâtiments existants et non occupés (Maisons du gouverneur de Petite Terre à Dzaoudzi et Grande Terre sur les hauts de Majimbini), et en utilisant mieux l’outil Travail d’intérêt général pour les mineurs
Enfin, il invite à repenser la lutte contre l’immigration clandestine en mettant en place « une coopération technique avec les îles voisines entre services de sécurité, et tout autre service, en privilégiant le transfert rapide d’informations et des délinquants, la création de garde côtes. » Il suggère, et c’est son dada, « le transfert de la base de la marine Nationale de Dzaoudzi à l’îlot Mtsamboro en privilégiant l’accès à l’îlot aux agriculteurs de Mtsamboro », ainsi que la mise en place de vedettes rapides de contrôle et de sauvetage. »
Mais il rappelle qu’un enfant « n’a pas de nationalité, il reste un enfant », « s’il est mal éduqué nous en récolterons tous les conséquences, bien éduqué nous en récolterons tous les fruits », et invite à « une éducation participative. »
Comme le procureur Garrigue ce mardi matin, le capitaine-syndicaliste s’adresse à qui voudra bien l’entendre: Etat, élus départementaux et communaux, parlementaires… mais qui voudra bien les entendre ?
A.P-L.
Le Journal de Mayotte
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