Les crispations sont nombreuses autour de l’enjeu des bateaux de pêche à Mayotte. Modernisation des barques, achat de nouvelles embarcations, normes, rôle de l’Europe… Il y a de quoi s’y perdre y compris pour les pêcheurs eux-mêmes. Pour tenter de mettre les choses au clair, les affaires maritimes vont entamer une véritable tournée des villages, pour expliquer en détail, les tenants et les aboutissants de ces dossiers.
«Les pêcheurs ont besoin de comprendre de quoi on parle. Lorsque nous nous adressons à la CAPAM qui est notre interlocuteur naturel, on parle avec des techniciens qui sont en mesure de voir les enjeux. Ce n’est peut-être pas le cas de tous les pêcheurs dans les villages», explique Serge Chiarovano, chef d’unité territoriale à la direction de la mer Mayotte.
Ces rencontres débuteront le 12 mai à Mtsapéré puis cette tournée passera par Sada, Chiconi, Kani-Kéli, Mtsamboro… A chaque fois, il s’agira de mettre les choses au clair, directement avec les pêcheurs car la question de la modernisation des embarcations de pêche est sensible.
La fin des dérogations
Mayotte compte environ 150 barques de pêche. Il y a 10 ans, elles étaient enregistrées sur un fichier local mais avec l’approche de la départementalisation, il a fallu les intégrer au fichier national, puis avec la RUPéïsation au fichier communautaire… et elles auraient dues s’adapter à l’applications des réglementations que cela implique.
Pendant des années, les pêcheurs mahorais ont obtenu le droit de déroger au code des transports pour permettre ces mises aux normes. Mais c’est à présent terminé. Le ministre chargé de la mer, Alain Vidalis, a d’ailleurs clairement précisé que les conditions de navigations des barques de pêches à Mayotte ne doivent plus être «dégradées» par rapport à la métropole et aux autres DOM.
10 ans trop tard
Problème : entre 40 et 50 barques ne se sont pas pliées à ces changements pour de multiples raisons. Et tous les regards se tournent à présent vers l’Europe qui ne finance plus l’achat de bateaux neufs, ce qui, la plupart du temps, coûteraient pourtant moins chers qu’une remise aux normes de barques qui ont plus d’une vingtaine d’années.
Si l’Europe n’aide plus pour acheter, les derniers à avoir bénéficier de la manne européenne… Ce sont les autres RUP, que la Commission de Bruxelles a accepté d’aider pour atteindre les normes européennes. Mayotte arrive 10 ans trop tard. Il ne serait pourtant pas illégitime de bénéficier à notre tour de ces fonds.
Il faudrait donc une montée au créneau puissante de nos élus pour faire entendre la voix des pêcheurs mahorais… et faire accepter aux autres pays de l’Union de mettre de l’argent sur ce sujet pour Mayotte.
Expliquer l’intérêt des contrôles
La tournée des Affaires maritimes va donc tenter d’expliquer ces normes mais aussi les contrôles de sécurité qu’elles effectuent.
«On peut faire la comparaison avec ce qui se passe à terre. On attend d’un véhicule qui transporte des passagers qu’il n’est pas les pneus lisses et que les freins fonctionnent correctement. Ce qui semble être une évidence à terre ne l’est pas encore en mer», souligne Serge Chiarovano.
Car si les normes sont la plupart du temps vécues comme des contraintes, elles ne sont pas apparues par hasard. Elles servent bel et bien la sécurité des équipages. Les secours en mer en savent quelque chose : barques échouées ou à la dérive après des avaries, les interventions de secours pourraient être moins nombreuses si les conditions de travail en mer étaient meilleures.
Le drame du 4 avril dernier se présente aussi comme un triste rappel : une barque de pêche s’est retournée. Deux hommes étaient à bord mais un seul portait un gilet de sauvetage. Le deuxième s’est malheureusement noyé.
RR
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