C’est le premier Forum régional ouvert par Mayotte. Présidente de l’UCCIOI, l’Union de chambres de commerce et d’industrie de l’océan Indien, Isabelle Chevreuil va donner le coup d’envoi de l’Indian ocean Network dédié à l’économie numérique à Tananarive le 28 juin 2016.
La présentation du programme à la presse se faisait en simultanée sur les territoires membres de l’UCCIOI, que sont les Comores, Madagascar, La Réunion, Maurice et les Seychelles. Le président de la CCI Mayotte, absent mais qui ne rate plus une occasion de rappeler la modernisation son institution, avait laissé un mot souhaitant « que le Forum soit propice au développement du Business régional. »
L’objectif est en effet non seulement de valoriser le savoir-faire des opérateurs de la région en matière de technologies de l’information et de la communication (TIC), mais qu’elles soient aussi utilisées comme levier de développement des autres secteurs d’activités, avec notamment des créations d’emploi à la clef.
Un marché de 2 milliards d’euros à La Réunion
Et ça marche : « La Réunion et Maurice ont orienté leur développement vers le numérique, qui représente sur l’île Bourbon un marché de 2 milliards d’euros. A Mayotte, il est de 5% environ de cette somme », explique Feyçoil Mouhoussoune, le président du GEMTIC, le Groupement des entreprises Mahoraises des TIC créé par la CCI Mayotte.
Même mieux, un pays entier a bénéficié de ce levier, « l’Estonie, ex-pays soviétique de 1,3 million d’habitants, a axé son développement sur le numérique, et a gagné son pari », argumente Isabelle Chevreuil, « Skype a notamment été créé par un estonien. » Le modèle estonien fera d’ailleurs l’objet d’une des conférences proposées lors du Forum.
S’il s’agit d’identifier la place de ce secteur numérique dans notre région des îles du sud-ouest de l’océan Indien et de définir les besoins en infrastructures numériques, l’objectif final est de créer un cluster, « un groupement d’entreprises, pour pouvoir attaquer des marchés plus gros que nous que sont ceux du Mozambique ou de la Tanzanie », souligne Feyçoil Mouhoussoune. C’est lors d’un Forum comparable qu’a notamment été lancé le concept de la Web cup.
Il faut une vision politique
Toutes les entreprises et les associations représentatives des TIC sont visées, les usagers « comme le tourisme ou la presse », les instituts de formation « dont la valorisation des compétences » ou les autorités publiques.
Justement, pour porter des politiques de développement du numérique, il faut… une vision et des politiques. « Ils seront invités et nous espérons qu’une forte délégation se déplace à Tananarive. Au niveau local, nous avons besoin d’écrire notre stratégie de développement », souligne Feyçoil Mouhoussoune. Le prix du déplacement par Air Austral, le plus cher de toutes les délégations, est de 700 euros.
Mayotte et les Comores ne peuvent pas se projeter sur la même échéance que Maurice ou La Réunion quand les débits des territoires divergent autant. Madagascar a su s’adapter : « elle a développé le Outsourcing, c’est à dire les plates-formes d’appel (assurances, opérateurs téléphoniques, etc.), que lui permet sa main d’œuvre pas chère. Nous devons trouver nos propres créneaux de développement. »
Étude d’impact du Forum envisagée
« Et nous ne pouvons pas regarder un train en marche sous prétexte d’un débit moins performant », appuie Isabelle Chevreuil, « nous devons prendre note de leurs avancées pour nous y préparer. »
Le premier atelier portera sur « Le numérique au cœur de l’agriculture », « qui permettra de poser un regard de modernité sur l’agriculture », le deuxième sur « Le virage numérique du tourisme régional », dont l’axe des Iles Vanille, le troisième « Les stratégies de transition numérique pour les entreprises », « dont le e-commerce, la stratégie digitale », et le 4ème, « E-santé : vers une filière du numérique en santé et bien-être », avec des rêves de télémédecine « en cas d’absence de praticiens. »
Des tentatives pour percer les marchés est-africains, il y en a déjà eu plusieurs, sans que les échos de leurs succès soient retentissants.
Une remarque que les organisateurs prennent très au sérieux, au point d’avoir décidé de tirer une évaluation ultérieure de ce Forum : « Nous n’avons jamais fait de bilan exhaustif, alors que par exemple à la suite d’un colloque, trois entreprises mahoraise ont percé le marché comorien et y travaillent depuis », indique Ali Abdou, responsable du Pôle international de la CCI. Tandis que Feyçoil Mouhoussoune remarque que cela éviterait de refaire les mêmes erreurs : « A partir d’une étude d’impact, une entreprise peut décider de réorienter sa stratégie de développement. »
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
Comments are closed.