Le sénateur Thani Mohamed Soilihi s’était saisi d’une motion émise en 2014 par le précédent exécutif du conseil départemental de Mayotte, demandant une évolution du mode de scrutin et un nombre d’élus à hauteur des besoins d’un département et d’une région.
Mais pour le président du département Soibahadine, comme pour le député Aboubacar ou le président des maires Omar Oili, impossible de statuer sur ces deux points sans préciser en amont que Mayotte est bien département et région : « Nous demandons que notre territoire devienne une collectivité territoriale unique comme la Guyane et la Martinique, pour mieux s’assurer ensuite de ses compétences régionales et départementales. »
Ce qui choque le président Soibahadine c’est que Mayotte se retrouve dans le même bloc que St Martin et Saint Barthélemy, et Saint Pierre et Miquelon, « deux anciens départements qui ont choisi de redevenir collectivité territoriale. » En demandant la même appellation de collectivité territoriale pour Mayotte, même si ce n’est pas le même statut, on peut craindre une confusion, « la population ne va plus rien comprendre puisqu’on reprend une ancienne appellation », faisait remarquer l’ex-président Daniel Zaïdani.
Scinder les recettes du département et de la région
Il faisait notamment remarquer que tout était déjà écrit : « Vous demandez d’obtenir une appellation que nous avons. La collectivité unique a été créée par la loi de 2010 à la suite du référendum, nous avons même été la première du genre ! La Guyane et la Martinique étaient déjà départements et régions, il y a donc eu seulement substitution, quand pour nous il y a eu création. »
C’est bien là tout le problème. Car en partant de rien, les élus n’avaient alors pas le recul nécessaire pour défendre les compétences propres au département et à la région, et leurs budgets respectifs. C’est ce qui fait défaut aujourd’hui. Et d’ailleurs, le travail sur la délimitation des charges afférentes au département et celle de la région, toujours promis, n’a pas encore été bouclé. Peut-être même pas initié.
Daniel Zaïdani s’interroge donc sur l’opportunité de bloquer une proposition de loi qui va passer au Sénat soit le 30 juin ou soit en septembre, appuyé par une trentaine de sénateurs, et qui permettra de réviser utilement le mode de scrutin et d’obtenir 39 conseillers départementaux au lieu des 26 actuels. « Même si vous considérez que le nombre idéal est de 51 comme en Guyane, c’est déjà un premier pas de franchi. Et si votre démarche est justifiée par les incompréhensions de bureaucrates à Parsi, il n’y a qu’à leur expliquer. »
Lobbying contre motion d’opposition
D’autre part, le président Ramadani demande que dans un second temps les compétences de la région leur soient dévolues, comme la construction des collèges et lycées, ainsi que les routes nationales. Mais aussi les liaisons maritimes avec l’application de la continuité territoriale, ou encore la prise en charge des mineurs isolés, « que l’on pourrait transférer à l’Etat », une demande sur laquelle le département a eu l’éch de l’avancée législative obtenue là encore par Thani Mohamed l’année dernière.
Défendant mordicus sa motion Soibahadine Ibrahim Ramadani rappelait qu’à la demande de la ministre des Outre-mer, des groupes de travail s’étaient constitués, « et pas seulement sur la fiscalité, mais aussi sur une réforme institutionnelle. » Sans en préciser l’état d’avancement.
Malgré l’invitation de l’ancien président Zaïdani de faire du lobbying pour que cette loi passe au Sénat, « en cumulant les demandes sur l’avancée statutaire en même temps que la réforme électorale, nous risquons d’aller nulle part », la motion de Soibahadine Ibrahim a été votée, et malgré deux votes contre de Daniel Zaïdani et Chihaboudine Ben Youssouf, et 5 abstentions.
Ce projet de délibération a donc pour objectif de bloquer l’évolution de la proposition de loi de Thani Mohamed Soilihi au Sénat.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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