La prise en charge par le gouvernement de la protection de l’enfant, c’est lui, le lancement d’un débat sur le droit du sol à Mayotte en allant à contresens des idées de son parti, c’est encore lui, la reconnaissance de l’entité Mayotte-Région, il l’avait initiée, la mission parlementaire sur le foncier Outre-mer, il en est un des membres actifs… le sénateur Thani Mohamed Soilihi ne veut pas de satisfecit dit-il aux médias pour son bilan annuel, sans doute le dernier avant les élections sénatoriales de septembre 2017. Mais on peut lui reconnaître d’avoir été visionnaire.
Parfois trop, puisque sa révision de la loi sur la diffamation a provoqué des réactions en chaîne et décalées (sa tribune date du mois de septembre) de la presse nationale : « Nous sommes attaqués sur la liberté d’expression alors qu’il s’agit d’adapter la diffamation liée à la loi de la liberté de la presse à l’arrivée d’internet et des milliers de commentaires sur Facebook. Des journalistes se sont sentis visés alors que des règles déontologiques les protègent. Avec le sénateur et ancien ministre Alain Richard, nous avons préparé un droit de réponse. »
Saisi par le département puis contré
« Etre parlementaire, ce n’est pas faire nécessairement ce que la population attend, c’est avant tout expliquer la logique de notre action », martèle-t-il. Ce qu’il exècre par dessus tout, c’est sans doute la démagogie.
Lui qui ne voulait pas, par exemple, d’un débat sur le droit du sol en période électorale, est servi… Il se satisfait malgré tout que le conseil d’Etat soit saisi et tranche : « Le sujet mérite un débat calme, et nécessitera de toute façon l’adhésion des 3/5ème du parlement pour aboutir. » Concrètement, il proposerait une expérimentation sur 5 à 10 ans, « pour en évaluer l’impact », qui n’est pas aussi évident qu’on pourrait le penser, « beaucoup de naturalisations bénéficient déjà du droit du sang lorsqu’un des parents de l’enfant est français. »
Des deux temps forts de l’année, celui qu’il cherchera à oublier est sans doute la motion des élus départementaux contre sa proposition de loi (prise à leur demande) modifiant la gouvernance politique du département, à la fois sur le nombre d’élus qui devaient passer de 26 à 39, et le mode de scrutin, « il vaut mieux élire une liste désignant un président, que de se retrouver dans une 3ème mi-temps avec des élus enfermés en conclave sans téléphone. » Une action qui pourrait avoir été ourdie par un ministère, « c’est ce qu’on dit, mais ce sont des méthodes qui ne m’intéressent pas. »
Débat houleux avec G. Pau Langevin
Il se souvient d’un débat houleux au Sénat avec l’ancienne ministre des Outre-mer George Pau-Langevin, lorsque, saisi par le président du conseil départemental, il tentait de faire reconnaître le statut de région pour Mayotte, et la dotation globale qui va avec : « Heureusement que des collègues m’ont appuyé et ont écrit au ministère des outre-mer. C’est comme ça que le sujet a été acté lors de la rencontre avec Manuel Valls en avril dernier. Il faut maintenant se battre sur le montant que 800.000 euros proposé. »
L’autre temps fort de l’année, c’est la mission menée autour du foncier et de ses blocages en Outre-mer. « Sans ce point, pas de fiscalité juste, ni de discussion sur les budgets des collectivités. » Mais problème, un sénateur représente les collectivités locales, et il n’a pas de position du conseil départemental sur le sujet : « Ma première proposition est de créer une Commission d’urgence foncière sur le modèle de la CREC*. Mais j’ai un peu peur de déposer un amendement qui pourrait être contré ensuite »…, poursuit-il dans un sourire de chat échaudé.
Un bilan d’activité décliné sur une bonne soixantaine de pages, et qui évoque aussi ses travaux en cours, sur lesquels nous reviendrons.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
* Commission de révision d’Etat civil
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