Contrairement à la confédération paysanne, aux Agriculteurs responsables (CR) et au Modef (fédération syndicale des exploitants familiaux de Mayotte), la Fédération Départementale des Syndicats d’Exploitants Agricoles de Mayotte (FDSEAM) n’est pas dans la rue. Mais sa présidente Laïni Mogné-Mali, s’étonne : « Nous avons un courrier de notre syndicat national où le gouvernement s’engageait à un début de versement de la PAC dès ce mois de décembre, il n’était pas question de février. » (Lire le courier-fnsea-ja-action-pac)
Si Ali Ambody, Modef, a décidé de ce mouvement, c’est pour protester contre des promesses non tenues : « Lors de notre grève du 4 juillet dernier, on nous avait dit en septembre, maintenant c’est février… Que va-ton nous dire à nouveau à l’échéance ?! »
Le directeur de la DAAF (Direction de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt), Jean-Michel Bergès, explique qu’il se bat depuis un an face à l’administration parisienne qui avance à coup de normes : « L’ensemble des agriculteurs français ont pâti de ce retard de la PAC, lié à un changement d’outils de paiement. Mais ils ont pu demander des avances de trésorerie, avec des seuils de volume de production qui couvraient 80% des agriculteurs du pays, mais certainement pas les petites exploitations mahoraises. J’ai demandé d’abaisser le seuil, en vain. » Les syndicats nationaux n’auraient pas assez défendu Mayotte de leur côté.
Rallier d’autres manifestants
Il rapporte la confirmation de l’Agence de services et de paiement, de déblocage des fonds pour mi-février. Et avoue que les agriculteurs mahorais ont du mérite, pour « tenir sans être payés pendant un et demi. »
C’est aussi son départ que souhaitent les trois structures grévistes, pas la FDSEAM : « Il y a un protocole à respecter. Si on pense que le directeur de la DAAF ne prend pas assez de décisions, il faut commencer par alerter le préfet, et non se mettre en grève immédiatement. »
Ali Ambody nous l’a dit au téléphone, « si la PAC est payée, j’arrête le mouvement, mais sinon, je pourrais m’allier avec d’autres manifestants comme le SNUipp des enseignants. »
Trop de poules tuent les œufs d’or
Tant qu’à faire que de descendre dans la rue, il réclame aussi davantage de protection des petits agriculteurs « contre les gros », et cite AVIMA, dont le président du conseil d’administration Pierre Baubet, arrive avec le projet d’un poulailler de 22.000 volailles. Pour le directeur de la DAAF, il n’y a pas d’incompatibilité : « Tout confondu, l’élevage avicole mahorais comprend 75.000 poules pondeuses, et nous sommes obligés d’en importer en période de fête. Il y a encore de la place pour 50.000 à 70.000 poules. » Ce qui permettrait de faire baisser les prix, une opération que tous ne voient pas d’un bon œil, et pourtant la consommation serait boostée, donc leur chiffre d’affaire.
Ce qu’Ali Ambody reproche à la DAAF, c’est surtout le manque d’accompagnement : « Les structures bien installées savent monter les dossiers, pas les petits agriculteurs. Il n’y en aura que pour AVIMA et la SCAM, alors que nous ne demandons qu’à nous mettre aux normes. Le député Younous Omarjee a demandé 30 ans de dérogation pour les Outre mer. A Mayotte, avec nos retards, nous ne pouvons pas être traités comme si on était en métropole. »
Pour l’instant, les négociations sont rompues, les grévistes du Modef ayant quitté la table préfectorale des négociations hier, en signe de mécontentement contre la présence du directeur de la DAAF.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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