En ce jour de Noël, le conservatoire du littoral de Mayotte espère un cadeau au pied de ses baobabs… Car l’institution croit dur comme fer au Père Noël et elle l’attend fermement. Ce personnage providentiel, c’est celui qui répondra à l’appel à projets, une ouverture à concession valable pour encore un mois.
L’objectif est de trouver un exploitant* qui fasse vivre un lieu réellement exceptionnel: les Pointes et les plages de Saziley. Ici, à proximité de la tête de crocodile, ce dôme volcanique vieux de près de 3 millions d’années, se trouvent 480 hectares d’un paysage très particulier, caractéristique et protégé. Sur la terre, des padzas aux teintes rougeâtres, une forêt sèche aux espèces emblématiques, et des baobabs par centaines, africains et malgaches. Au total, sur Saziley et Charifou, ce sont près de 700 baobabs qui imposent leur majesté aux hommes et servent de bases aux oiseaux endémiques, comme le Souïmanga, aux makis et roussettes.
Saziley, c’est aussi, bien entendu, le paradis des tortues marines. Dans la zone, à la nuit tombée et lors des marées hautes, dix plages accueillent les tortues qui viennent pondre dans le sable entre 100 et 150 œufs qui écloront après 2 mois d’incubation. On estime à 1.500 le nombre de pontes annuelles sur ces plages.
Acquérir pour protéger
Vivre et développer un projet dans ce cadre magique ? C’est donc ce que propose le conservatoire du littoral. L’idée est d’assurer une présence dissuasive face à ceux qui pourraient porter atteinte à l’environnement. Il s’agirait aussi d’encadrer la zone de bivouac, l’observation et la protection de la ponte des tortues, mais aussi développer des prestations à partir de la maison des gardiens, le fameux bâtiment entouré de grillage, l’unique construction plantée au milieu du site.
La maison de Saziley est une réalisation déjà ancienne de la DAAF, au moment où le site était imaginé comme un parc naturel. En 1995, le conservatoire du littoral est mis en place à Mayotte et il s’intéresse immédiatement au lieu. Sa mission principale: acquérir du foncier pour le protéger.
A l’intérieur de Saziley, 230 hectares de terrains sont achetés à la collectivité départementale. Le bâtiment sert alors d’abris pour la surveillance des tortues et un offre un camp de base pour des recherches scientifiques, puis finalement un abri aux gardes avant d’être livrée à elle-même.
Une activité pour éviter la démolition
Abandonnée depuis trois ans, la maison est maintenant délabrée -même si sa structure reste solide- et son accès est fermé. A deux reprises, ses portes se sont à nouveau ouvertes ces dernières semaines. Le conservatoire a en effet organisé deux visites dans le cadre du son appel à projets.
Le conservatoire espérait montrer les atouts du bâtiment pour qu’un éventuel concessionnaire imagine des idées à développer à l’intérieur… Mais les visiteurs n’ont pas été très nombreux. «On ne sait pas encore si on va trouver quelqu’un qui va se porter candidat», confie Cris Cordjee, du conservatoire du littoral à Mayotte.
Il n’est pourtant pas difficile d’imaginer un avenir à la maison en bois. Au rez-de-chaussée, des activités de restauration ; à l’étage, des chambres aménagées pour ceux qui voudraient profiter de la magie du lieu autrement que sous une tente ou dans un hamac… «Soit une activité et possible, soit il va falloir la démolir. Si personne ne soumissionne, ce n’est pas exclu», précise Cris Kordjee. «Pourtant, on peut en faire quelque chose de bien, qui profiterait pas seulement aux touristes extérieurs mais aussi aux personnes de Mayotte.»
Prêt à y mettre du sien
Pour réussir ce marché de concession, le conservatoire est pourtant très ouvert. Car ce n’est pas un marché public comme les autres, avec d’emblée, une phase de négociation. Il ne s’agit pas d’un dossier à prendre ou à laisser, mais bien un projet à construire avec les différents acteurs pour que chacun y trouve son compte. «Le conservatoire n’est pas là pour s’enrichir mais pour aider à monter un projet viable avec quelqu’un de motivé. On n’est pas dans une relation commerciale mais dans l’aboutissement de façon très apaisée d’une initiative qui nous tient à cœur…»
Face aux problèmes, «le conservatoire est vraiment prêt à y mettre du sien». Par exemple, pour limiter le coût de la remise en état de la maison, le conservatoire est prêt à prendre en charge le gros œuvre, les aménagements restant à la charge du futur opérateur.
Une légende à faire vivre
L’institution a espéré, un temps, que les opérateurs de Sakouli ou Ngouja voient dans ce lieu, une possible extension de leurs propres activités. Ils auraient pu proposer des prestations supplémentaires, et ajouter ce lieu magique à leur carte… Mais ils n’ont pas montré, jusqu’à aujourd’hui, une volonté de s’engager.
Certes, le cahier des charges comporte des contraintes. L’idée est de faire vivre un endroit qui abrite des tortues et des baobabs, desservi par la mer ou par 21km de sentiers de randonnées (dont un GR), avec la question sécuritaire à prendre en compte. Il faut donc à la fois vouloir faire des affaires et avoir une véritable fibre environnementale pour s’adapter à la configuration des lieux.
«Ce qu’il faut retenir, c’est que notre but est de trouver quelqu’un de motivé que nous allons soutenir par tous les moyens, nous et l’ensemble des institutions concernées», souligne Cris Kordjee.
Il reste encore quatre semaines pour trouver un futur opérateur, trouver celui qui veillera aussi sur le «cœur du ziara», ce «territoire fady» où les croyances font vivre les esprits de la pointe. Saziley est aussi une légende à faire vivre.
RR
www.jdm2021.alter6.com
*Voir la cdc_convention_sazileyvf
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