Vendredi, Jean-Jack Queyranne, désigné comme «émissaire spécial» par le président Hollande, et Luc Hallade l’ancien ambassadeur de France aux Comores aujourd’hui délégué à la coopération dans la zone océan Indien, ont donc été reçus au palais présidentiel à Moroni.
Ils n’étaient que deux, alors que la délégation devait être, à l’origine, composée de 14 personnes… Mais tout visiteur en provenance de La Réunion et de Mayotte, dont les deux préfets, ont été écartés. Raison officielle: la visite était de niveau diplomatique.
Cette visite entrait dans le cadre d’une mission «d’écoute et de dialogue», mise en place par François Hollande pour intensifier la coopération dans de nombreux secteurs. Durant presque deux heures d’un entretien qualifié de «cordial et franc», il a donc été question du budget des Comores, de l’entraide judiciaire, de la lutte contre la corruption, de l’accès à l’eau… Et de Mayotte.
Le président Azali Assoumani a fait valoir sa position. Il a indiqué «en vouloir profondément aux deux administrations, française et comorienne, qui ont pêché par laxisme, en ignorant les positions pourtant claires des présidents Giscard, Mitterrand et Chirac sur la question de Mayotte». La situation actuelle serait donc le fruit d’un «laxisme»… Durant les dix dernières années pourtant, les présidences Sarkozy et Hollande ont réaffirmé sans ambiguïté l’appartenance de notre île à la République française.
Santé et sécurité
Les discussions ont été plus concrètes sur de nombreux sujets. Concernant la santé, le projet de construction d’un pôle mère-enfant a été remis sur la table. Financé par l’Agence française de développement (AFD), le programme a été bloqué par les Comores alors qu’il était sur le point de démarrer. Revu par l’administration Azali, le pôle pourrait intégrer un projet global de reconstruction de l’hôpital El-Maarouf. L’ambassadeur de France aux Comores s’était montré hostile à cette idée il y a quelques mois. On ne sait pas si la position de la France a évolué.
Les questions de sécurité, de lutte contre le terrorisme et la radicalisation ont abouti à une «volonté commune» sur ces sujet: «Il faut que nos services, qui travaillent déjà ensemble, renforcent leur travail en matière de renseignement, pour la prévention, pour la neutralisation des individus qui pourront être dangereux, représentent un danger pour la France, les Comores et pour la communauté internationale», a déclaré Jean-Jack Queyranne.
Pour sa part, le président Azali Assoumani s’est dit «préoccupé» par la radicalisation de certains jeunes Français d’origine comorienne qui «pourraient faire des Comores un refuge, avec les conséquences prévisibles».
Les deux pays ont également évoqué les actions communes de patrouille en mer pour la protection des vies humaines, mais aussi la protection des intérêts comoriens par rapport aux trafics de tous genres.
Un IUT avec l’Université de La Réunion
France et Comores ont également parler éducation et formation professionnelle. «Il y a une plus grande attente sur la formation des électriciens, des mécaniciens, des maçons. Donc, nous ferons des propositions. On a déjà dit qu’il pourrait y avoir le «service militaire adapté» qui existe déjà dans un certain nombre de pays, notamment à Madagascar et en Guinée, pour définir les besoins de formations qui peuvent être assurés en relation avec l’armée et les militaires français, eux-mêmes formateurs», a souligné Jean-Jack Queyranne.
La France souhaite aussi être active dans le domaine de l’éducation en soutenant la création d’un IUT en partenariat avec l’Université de La Réunion.
La corruption dans le viseur
Le président comorien a enfin justifié sa décision de suspendre les marchés conclus sous la précédente mandature et dénoncé les entreprises étrangères «qui ont accepté des comportements condamnables durant des années et aujourd’hui crient au scandale». Pour Azali Assoumani, «le temps du désordre et de l’impunité est terminé pour tout le monde, y compris ces entreprises qui avaient pris de mauvaises habitudes». Il oublie peut-être un peu vite que pour qu’il y ait corruption, il faut des corrupteurs… mais aussi des corrompus.
Des actions de développement de la France aux Comores soient «plus efficaces» par rapport aux fonds engagés. C’est finalement le souhait de François Hollande transmis par son émissaire. «La France a une attention particulière pour l’ambition impulsée par le président Azali de changer les Comores ; je salue votre volonté de faire des Comores, un pays avec un budget, une organisation et de l’ordre», a ajouté Jean-Jack Queyranne.
«Au-delà des liens de l’Histoire, nous avons aujourd’hui des liens de sang, notamment par les très nombreux couples mixtes franco-comoriens. Nous avons dans ce pays la plus forte diaspora comorienne de l’étranger. Nous partageons un certain nombre de grandes valeurs humanistes. Nous avons également en partage cette belle langue, qui nous permet de communiquer si aisément. Et c’est pour cela que cette relation doit être basée sur le respect mutuel», a conclu le chef de l’Etat Azali Assoumani.
RR
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