On n’en finit plus de découvrir des nouveautés en ouvrant les tiroirs de la Loi Egalité réelle. La dernière en date porte sur des réductions d’impôts conséquentes ouvertes à tout investisseur qui mettrait ses billes dans un Fonds d’Investissement de Proximité (FIP) ultramarin. Une opération auparavant réservée aux seuls résidents fiscaux des DOM-COM.
En clair, cette mesure, qui sera applicable début 2018, permettra à tous les Français qui veulent investir dans un Fonds d’investissement ultramarins de bénéficier d’une réduction d’impôt sur le revenu majorée à 38%, alors qu’elle est de 18% pour les mêmes FIP en métropole. Un duo gagnant-gagnant, à la fois pour les épargnants, mais aussi pour les PME de nos DOM. Un placement parfois plus risqué qu’en métropole, mais à la hauteur de la réduction fiscale proposée.
Une fois collecté auprès des épargnants, l’argent est injecté dans le capital de plusieurs jeunes sociétés, sélectionnées par des sociétés de gestion en fonction de leur potentiel de croissance. A Mayotte, plusieurs ont ce profil, bien que le contexte social, même apaisé, reste fragile. Notre taux de croissance de 9% pourrait attirer néanmoins.
Les entreprises toujours plombées par les délais de paiement des collectivités
« Une bonne initiative car les entreprises ultramarines ont besoin d’apports en capital. A Mayotte en particulier où la Banque publique d’Investissement n’intervient pas sur ce besoin en fonds propres des chefs d’entreprises », témoigne Jacques Launay, Responsable du Pôle Entreprise, Emploi, Economie à la Direction du Travail (DIECCTE).
Un vide comblé par les prêts d’honneur de Initiative Mayotte, mais qui concernent de petits projets, puisqu’avec 15.000 euros prêtés à taux zéro, l’investissement final ne dépassera pas les 80.000 euros dans le meilleur des cas.
Le problème se pose pour les entreprises de taille intermédiaire, « avec des projets plus importants mais qui ont des problèmes de fonds propres, en dépit d’une activité souvent soutenue. » Les délais de paiement des collectivités ne se sont pas améliorés, « malgré l’application automatique d’intérêts moratoires de la part du comptable public », mentionne Jacques Launay. Certaines communes ont un budget alloué à 95% à leur masse salariale.
4 piliers : les fondations de base de la création d’entreprise
Pour ces entreprises, ni trop petites, ni assez grandes pour avoir les reins solides, il y a peu de recours d’apports en capitaux, « alors qu’elles peuvent avoir besoin d’agrandir leurs bâtiments, ou investir dans des outils de production. »
Sur ce sujet une étude intéressante a été menée par Technopolis en 2015, cofinancée par le conseil départemental et l’UE. Elle s’interroge sur le type d’instruments financiers à la fois appropriés à Mayotte et adaptés à la consommation des fonds européens. Une de ses conclusions a trouvé sa réponse dans la mise en place de prêts d’honneur, puisqu’il s’agit « d’améliorer le financement des jeunes entreprises dès le départ en satisfaisant la demande de prêts de faibles montants allant de 10.000 à 50.000€ ».
Mais les autres pistes sont encore à mettre en place, comme « le renforcement du soutien de l’accès aux entreprises aux financement bancaires en renforçant les fonds de garantie. » « Il s’agit d’élargir la période de prêt et d’en accroitre le montant, en gros, remettre en place l’équivalent du Fonds Mahorais de Garantie », explique Jacques Launay.
Nous revenons toujours au point de départ, souvent évoqué dans nos colonnes, celui d’un territoire peu structuré duquel on a retiré les outils nationaux qui lui aurait permis d’avancer, pour le larguer dans la jungle européenne. La fleur qui dessine à la fin de l’étude les 4 piliers de la stratégie d’investissement en redonne le parfum : l’amélioration des conditions de préfinancement aux prêts européens, la normalisation de l’activité économique (et on a fait un grand bond dans ce domaine avec des k-bis obtenus en 3 mois), l’animation de réseaux, et l’attractivité et la compétence des dirigeants.
Au conseil départemental, un travail est en cours qui devrait bientôt porter ses fruits pour faciliter l’accès aux crédits aux PME de taille intermédiaire. Qui voient donc d’un bon œil cette nouvelle mesure de la Loi Egalité réelle.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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