«Cinq années d’une volonté constante de rassembler et de réconcilier les mémoires pour une France plus unie et plus forte». C’est ainsi que l’Elysée dresse le bilan du quinquennat sur la reconnaissance de l’esclavage, au moment où François Hollande préside la cérémonie de la Journée nationale des mémoires au Sénat. Ce sera la 2e occasion pour le chef de l’Etat et son successeur de se retrouver depuis l’élection présidentielle, après la commémoration de la capitulation de l’Allemagne le 8 mai sous l’Arc de Triomphe, à Paris.
Il y a tout juste un an, 15 ans après la loi Taubira faisant de l’esclavage un crime contre l’humanité, le président avait annoncé sa volonté de créer une Fondation pour «donner à la mémoire de l’esclavage l’institution nationale qui lui manque encore».
Lentement, les choses se mettent en place. Le 3 mai dernier, François Hollande a présidé, au palais de l’Elysée, la signature des statuts du Groupement d’intérêt public (GIP) «Mission de la mémoire de l’esclavage, des traites et de leurs abolitions».
Ce GIP, qui doit se transformer en Fondation en 2018, réunit l’Etat, la Banque de France à travers sa filiale dans les Outre-mer l’IEDOM, la Caisse des dépôts et consignations, le Conseil représentatif des Français d’outre-mer (CREFOM), l’Institut du Tout-Monde-Edouard Glissant, la Fondation Esclavage et Réconciliation et l’association «La Route des Abolitions».
Un mémorial et un musée
Pour ce GIP, présidé par Jean-Marc Ayrault à l’issue de ses fonctions de ministre des Affaires étrangères, l’Elysée annonce des «moyens nouveaux apportés par l’Etat» pour fédérer les acteurs de la mémoire de l’esclavage. Son objectif sera de mettre en œuvre des actions éducatives, culturelles et citoyennes sur ce sujet. Il travaillera aussi avec la ville de Paris à la création d’un monument, «un mémorial aux esclaves», et «d’un lieu muséal démontrant que la France a la capacité de regarder son histoire».
La création d’un tel musée de l’esclavage est une demande récurrente des associations antiracistes, alors que le sujet reste lourd d’enjeux de mémoire. La traite la plus importante aurait concerné entre 12 et 18 millions d’Africains, déportés depuis l’Afrique Subsaharienne vers les Amériques, entre le milieu du 17ème siècle et les années 1850. Comme on a pu le voir à Mayotte le 27 avril dernier, l’esclavage n’est pas le seul fait des Européens. Mais la traite transatlantique est devenue un véritable commerce d’êtres humains impliquant des régions d’Afrique dont il était auparavant absent.
Deux siècles de traite européenne
Jeune Afrique rappelle que c’est en 1642 que le roi de France Louis XIII autorise la traite des noirs. Le système va au fil du temps se renforcer alors qu’une prise de conscience commence à émerger peu avant la révolution française. Dès 1780, des organisations antiesclavagistes voient le jour, avec la volonté de propager des idées humanistes. C’est d’abord l’Angleterre qui supprime la traite négrière en 1807. Et si la France s’engage «à unir ses efforts à ceux de la Grande-Bretagne» en 1814, il faut attendre 1830 pour voir les derniers navires négriers traverser l’Atlantique. En 1832, la France accorde aux mulâtres et Noirs libres l’égalité civile et politique.
Le 27 avril 1848, le décret d’abolition de l’esclavage dans les colonies et possessions françaises est promulgué sous l’impulsion de Victor Schoelcher, sous-secrétaire d’État aux colonies.
Dans le droit du travail
La commémoration de ce 10 mai a été instaurée en 2006 et depuis, le travail de mémoire se poursuit et n’oublie les formes modernes d’esclavage. En 2013, une redéfinition de l’esclavage est inscrite dans le code du travail. Elle pose l’esclavage comme «le fait d’exercer sur une personne, les attributs du droit de propriété ou de la maintenir dans un état de sujétion continuelle en la contraignant à une prestation de travail, ou sexuelle, ou la mendicité, ou toute prestation non rémunérée».
Aujourd’hui, l’esclavage est aboli dans tous les pays du monde. Les deux derniers pays à l’avoir acté sont l’Arabie Saoudite en 1962 et la Mauritanie en 1980. Mais l‘association “Esclavage moderne” continue de recenser de nombreux exemples de formes contemporaines d’esclavage: esclavage pour dettes, travail forcé, esclavage sexuel, mariage forcé, esclavage traditionnel, travail des enfants… Et tous les continents sont concernés. L’ONG estime à 45 millions, le nombre de ces victimes chaque jour à travers le monde.
RR
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