Le conflit est parti comme une étincelle de la CGT Ma qui mène depuis un combat monosyndical à la Colas pour une hausse de salaires et l’octroi de primes. Syndicat majoritaire dans cette entreprise de 572 salariés, il est accusé par les 3 autres syndicats FO (anciennement majoritaire), CFDT et CFE CGC, d’avoir conduit une lutte sans concertation ni discernement. Dans un communiqué, ils condamnaient les dégradations commises par les cégétistes, et appelaient au retour de la « paix sociale ».
Étaient ciblées la préfecture pour libérer l’accès à l’entreprise en application d’une décision de justice, mais aussi la Dieccte, l’appelant à garder un œil paternel sur le bon déroulement des Négociations annuelles obligatoires (NAO).
Les trois signataires, El Anzize Hamidou, FO, Djoumoi Djoumoy, CFE CGC et Ousseni Balahache, CFDT, indiquaient en outre vouloir être force de proposition pour « restaurer le dialogue social » et « apporter leur contribution à la bonne marche de l’entreprise » sous réserve du respect de l’intérêt des salariés.
Mouvement individualiste
Ils réitèrent en cette fin de ramadan. Saisis une énième fois en fin de semaine dernière par les délégués CGT Ma qui se préfèreraient accompagnés plutôt que seuls dans ce mouvement, ils ont apporté la même réponse : « Il fallait nous associer dès le départ », nous expliquent en chœur les trois syndicalistes.
Un front commun contre la CGT qui pourrait évoquer une guerre des syndicats, sur fond de gestion de caisse des retraites complémentaires Agirc-Arco, chacun voulant récupérer le bébé qui devrait pour l’instant revenir à la CSSM, présidé par Salim Nahouda, également secrétaire départemental de la CGT Ma.
Pour El Anzize Hamidou, l’échec de ce mouvement est la preuve de l’impasse d’un comportement individualiste : « Moi même, je n’aimerais pas me lancer seul dans un rapport de force. Quand on lance un mouvement commun, il peut y avoir des mésententes, qui se solutionnent par une concertation pour repartir soudés. Par exemple, à la Sécu, FO voulait lancer la grève depuis 2014. Nous avons attendu qu’il y ait unité, et ça a fonctionné, comme pour le port de Longoni. »
« Rien à faire dehors »
Il a rencontré les délégués CGT Colas en fin de semaine dernière, « à leur demande », et s’est mis d’accord avec la CFDT et la CFE CGC pour adresser un courrier à la direction de Colas, « pour l’ouverture de négociations en urgence. »
Cette situation qui amène chaque jour des grévistes à faire le pied de grue devant leur entreprise de BTP n’est plus tenable pour Djoumoi Djoumoy : « Ils n’ont rien à faire dehors, il faut débloquer la situation en trouvant un point qui va dénouer les tensions entre les deux parties, quelque soit celui qui a raison. » Ils ne veulent pas entrer sur le fond des revendications, mais proposer des conditions propices d’échanges.
C’est dans cet esprit d’apaisement qu’il s’est désolidarisé au nom de la CFE CGC, d’un courrier de l’intersyndicale du conseil départemental, titré sur la quête pour « un salarié de la Colas mort au champ de bataille pour ses droits » : « l’objectif était de lancer une collecte de fonds pour sa famille ce que j’approuve bien sûr, mais pas en interprétant les raisons de sa mort. » Il a été rejoint dans cette démarche par Balahache Ousseni.
La direction se dit sensibilisée
Ils ont rédigé à 3 mains un courrier (Lire COURRIER COLAS) adressé au « directeur de la Colas Mayotte », où ils « dénoncent la situation conflictuelle et la spirale infernale des blocages à la Colas ». Ils y demandent la tenue d’une réunion d’urgence « pour rechercher ensemble une solution de sortie de conflit ».
Une réunion multipartite donc, sur laquelle ils misent beaucoup. Espérons que la direction saisira cette balle de conciliation au bond, « si ils ne viennent pas, on embrayera sur quelque chose de différent que le mouvement actuel, notre objectif est de sauver les emplois », conclut Djoumoi Djoumoy.
Nous avons pu contacter la direction de la Colas qui indiquait avoir reçu le courrier jeudi dernier, et vouloir « répondre favorablement à cette demande de rencontre dès la fin de l’Aïd ». Elle a par ailleurs réagi au décès du salarié Ada la semaine dernière auprès de sa famille, mais indique vouloir respecter sa volonté de discrétion quant à la forme qu’elle a prise.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
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