« En raison de la période électorale, nous n’avons pas pu fêter l’Europe le 9 mai dernier ». Ce n’était que reculer pour mieux sauter pour le président Soibahadine, puisque la célébration de ce 11 juillet permet de fêter le 5ème anniversaire du changement de statut de Mayotte, évoluant le 11 juillet 2012 de PTOM (pays et Territoires d’Outremer) à Région Ultra Périphérique (RUP) de l’Union Européenne.
D’autre part, ainsi que le rappelait Soibahadine Ibrahim Ramadani, l’Europe fête cette année un double anniversaire « celui des 60 ans du Traité de Rome et des 20 ans du Traité d’Amsterdam, socle de l’intégration de l’Ultra périphérie dans le Traité sur le Fonctionnement de l’Union européenne ».
Mayotte se félicitait donc d’être européenne, surtout que grâce à cette petite dernière RUP, ses 9 autres sœurs peuvent bénéficier de « l’arrêt Mayotte », pris par la Cour de Justice en décembre 2015, et « qui ouvre la voie à la prise en compte de la réalité des Régions ultrapériphériques de l’Union européenne en inversant la logique : plutôt que de demander des dérogations pour réparer des oublis, nous pouvons avoir recours à l’article 349 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne », comme le rappelait Soibahadine Ramadani.
L’Europe dans le Canal du Mozambique
Il expliquait la présence du Département au sein de l’UE comme la volonté européenne que « Mayotte soit tête de pont dans le canal du Mozambique ».
Un « Karibu Europa » sur la place de la République, si c’est pas un amoncellement de symboles ! La mention apposée sur la plaque dévoilée par les représentants de l’Etat et du Département, est accompagnée de trois dates-clés : le 31 janvier 2003, date de la délibération sur l’accès de Mayotte au statut de RUP, le 11 juillet 2012 la décision du Conseil d’Etat qui la validait, et le 15 décembre 2015, date de « l’arrêt Mayotte ». Une plaque qui symbolise pour le président Soibahadine un « double ancrage, Mayotte dans l’Union européenne et l’Union européenne dans Mayotte ».
Comme un écho à ce constat d’un territoire bien éloigné des concepts et normes européens, le préfet Frédéric Veau rappelait que faire le choix de l’Europe, ce n’était pas faire le choix de « l’uniformité », « dans les années 80, Jacques Delors avait proposé une approche spécifique avec le POSEIDOM pour répondre aux contraintes qui handicapent les RUP dans leur développement. »
A l’heure où ils sont malmenés par les eurosceptiques, le préfet rappelait les points forts de cette Union censée faire la force de ses 500 millions d’habitants : « L’espace Schengen de libre circulation, une monnaie unique, un espace commun de justice et de liberté, une politique commune d’amélioration des conditions de vie ».
« Una war unmöglish parce qu’ouvoimoja* »
Et évoquait les grands postes de consommation des fonds européens : « Les deux derniers amphidromes, l’étude de sécurisation de la piste de l’aéroport, l’hôpital de Petite Terre… », et une programmation « loin devant la moyenne nationale » à 30% sur les fonds structuraux FEDER et FEADER, sans évoquer les engagements, et de 17% sur le Fonds social, « ce n’est pas bon, on va simplifier le dispositif ».
Le moment fort fut la lecture par les enfants de l’association Ounagna d’un extrait de la déclaration de Robert Schuman en cinq langues, où il était question de « solidaridad de produccion, de « ouvoimoja », de « war unmöglich between France and Deutschland et impensable ».
Une petite exposition reprenant d’anciens panneaux au CDTM met justement en évidence les investissements européens. Les amphidromes en ont bénéficié pour les deux-tiers de leur investissement. Un remboursement qui tarde à venir. Mohamed Sidi, vice-président du CD qui en a la charge, balance entre la confiance, « un audit a été fait, nous attendons le retour de Bruxelles », et l’inquiétude, « il ne faut pas que ça tarde trop, car des petits porteurs de projets pourraient être en difficulté ».
Le préfet Frédéric Veau se veut confiant sur ce sujet : « La validation par le corps interministériel de coordination des contrôles n’est qu’une affaire de jour après que toutes les vérifications de dossiers aient été faites. »
Mayotte se lance donc dans le bain européens avec timidité, à la hauteur de ses capacités, mais elle en attend beaucoup dans l’avenir.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
* en 5 langues : « Une guerre impossible parce que tous unis »
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