A Mayotte, on fait de l’économie sociale et solidaire sans le savoir, “c’est dans l’ADN de la population”, aime à rappeler Ben Amar Zeghadi, le directeur de la CRESS Mayotte. Ici,346 structures relèvent de l’économie sociale et solidaire (ESS). Ce sont à 98% des associations. La forte implication des Mahorais et notamment des femmes, dans le développement des activités du privé, la solidarité qui règne dans ces dernières – pratique de la tontine, présence de la musada, « l’entraide », importante participation dans les tâches agricoles… – fondent un particularisme lié à l’expression de l’ESS. Elle représente une économie pour moitié informelle qu’il faut peu à peu structurer. On y trouve la co-construction de la maison du voisin, la participation de la communauté villageoise lors des fêtes locales, etc.
La CRESS a bénéficié pour 2016 d’une dotation de fonctionnement de 40.000 euros de la Direction générale de l’emploi. Des appels à projets du ministère des Outre-mer permettent également de financer des actions. Et tous les nouveaux projets solliciteront les fonds européens, le FSE.
En général, la répartition des établissements de l’ESS sur le territoire est corrélée au niveau de population. Sans surprise, la plus grande partie des établissements de l’ESS est située à Mamoudzou, 38%, et Koungou, 12%.
La CRESS invite les banques
Etonnamment, la moitié des établissements mahorais de l’ESS ne sont pas classés dans un secteur d’activité, « les nomenclatures INSEE sont trop généralistes », commente Ben Amar Zeghadi. Le secteur de l’action sociale (17%) et celui des sports et loisirs (14%) regroupent la majorité des établissements. Viennent ensuite l’enseignement (7%) et les arts et spectacles (6%).
L’absence de représentativité des activités financières, bancaires et d’assurance à Mayotte est à noter, alors que ce secteur est le 3ème en volume au niveau national, « nous n’avons pas encore les instrument financier qui permettraient de soutenir les porteurs de projet. Mais 3 banques sont sur le point d’adhérer à la CRESS ».
Mais ça va venir, assure le directeur. La CRESS de Mayotte est membre du comité d’appui technique du Dispositif Local d’Accompagnement qui permet aux associations employeuses, structures d’insertion par l’activité économique et autres entreprises d’utilité sociale de bénéficier d’accompagnements sur mesure. Elle est un des partenaires de l’incubateur de l’Economie Sociale et Solidaire « Mayutopie » porté par la CCI de Mayotte.
Prévisions de recrutement pour 2018
Si l’île compte 448 établissements rattachés à l’ESS, et 438 entreprises, la dynamisation du secteur aura permis à 102 de se créer entre 2015 et 2017, qui ont créé de l’activité économique.
En 2017-2018, ses priorités se porte également sur l’accès des entreprises ESS Mahoraises à des financements spécifiques pérennes, la poursuite de l’action auprès des 104 porteurs de projets rencontrés en 2017, « et des 35 que nous accompagnons déjà dont 10 dans l’émergence et la modélisation de leur projet. »
La Chambre Régionale de l’Économie Sociale et Solidaire pilote et anime un observatoire régional, l’ORESS, chargé comme son nom l’indique d’observer le dynamisme atypique des entreprises de l’ESS en matière de création d’établissements et d’emplois, de définir et mesurer les richesses (économiques, sociales, culturelles…) générées par l’ESS à l’aide d’indicateurs spécifiques, d’améliorer les conditions d’observation quantitative et qualitative de l’ESS. « Nous aurons donc l’année prochaine des chiffres plus précis ». Par exemple, l’ORESS a sondé la capacité de recrutement des associations pour 2018 (voir graphique).
La Caravane sociale et solidaire passe
Cinq dispositifs d’actions sont mis en place. Notamment le dispositif « Achat Socialement Responsable » est une réponse à l’appel à projet ESS 2016 au Ministère des Outre-Mer. « Il s’agit notamment d’inclure les clauses sociales et environnementales dans les marchés publics », explique Ben Amar Zeghadi.
On trouve aussi la Caravane, qui va se rendre dans les villages à la rencontre d’entreprises du secteur, ou encore un outil prometteur, la TE’ESS, pour Transition énergétique, écologique et de l’économie circulaire, qui doit identifier les potentialités et les limites en matière d’économie circulaire et des usages dans la consommation ou dans la production des énergies. On y retrouve le recyclage, l’allongement de la durée d’usage dans l’esprit de réemploi des objets, l’écologie industrielle…
Enfin, dans l’idée d’accompagner les porteurs de projet vers la réalisation de leurs projets, Acc’ESS est un outil, éprouvé au sein du réseau des CRESS qui impulse une dynamique et un processus d’accélération allant de l’idéation à la création de projet (entre 3 et 6 mois en fonction des projets).
A noter la nomination le 6 septembre dernier d’un Haut-commissaire à l’Economie sociale et solidaire et à l’innovation sociale, chargé de booster le secteur aux 165.000 entreprises et 2,4 millions de salariés.
A.P-L.
Le Journal de Mayotte
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