Dans la foule, une pancarte en carton promet ” la guerre civile” à Mayotte. “Les gens en ont raz-le-bol de la politique de l’immigration clandestine, explique Ali Saïd, de Ouangani, occupé à installer des barrières autour du podium place de la République. Les Mahorais ont voulu être avec la France pour être libres, pas pour être volés et dénigrés. Quand je dors, je ne me sens pas en sécurité. Moi je propose que le service des immigrés soit installé au consulat à Anjouan et à Moroni, comme ça les gens demandent leur titre de séjour là bas. Ou alors on propose un autre type de visa, mais il faut contrôler.”
Ahamed Oumari, Grand-Comorien d’origine et installé à Tsingoni depuis 1999 n’en a pas, lui, de titre de séjour. “Je suis en attente de régularisation, j’ai des rendez-vous à la préfecture. Moi je suis venu manifester car ce qui est dit ici ne nous avantage pas.” Nous, pour le manifestant, c’est “tous les citoyens des 4 îles. La frontière qui nous entoure est indivisible. La division entre l’Union des Comores et Mayotte n’a pas de sens, tant que la France est le père des quatre îles, elle doit essayer de rassembler. C’est tout l’archipel qui devrait être département.”
“Ils n’ont pas entendu la colère des Mahorais”
Issa Issa Abdou, vice président du Conseil Départemental est là quant à lui “pour maintenir la pression avant la réunion de cet après-midi à Paris (au ministère des Outre mer NDLR). Sur la forme, comment se fait-il que cette réunion soit avec un directeur de cabinet et non avec la ministre ? Ils n’ont pas entendu la colère des Mahorais. On pensait que la feuille de route se ferait avec nous, mais pour eux ça ne va pas de soi. Tout ça ne peut pas se décider à Paris. Ensuite sur le fond, on n’est pas d’accord avec cette feuille de route. Une députée (Ramlati Ali) dit l’avoir vue, si on s’y fie, le fond est scandaleux. Si ce visa gratuit part d’une bonne intention, pourquoi le cacher aux Mahorais ? Il faut déjà que le document soit rendu public. Si les bribes qu’on en a eues se confirment, on n’en veut pas. Le seul intérêt, c’est qu’on oblige les Comores à jouer le jeu. Mais ils ne le feront jamais. Beaucoup de dispositifs ont été testés, et la coopération est toujours à sens unique.”
Le cortège de 2.300 personnes selon la police qui explique avoir effectué un comptage individuel, suit le même parcours que lundi, avec un passage devant le service des Etrangers. Mais cette fois, avec une halte prolongé devant le dispensaire Jacaranda, essentiellement consulté par les étrangers. A peine le rideau de fer descendus, que quelques coups de poings de bouénis échauffées, s’abattent, elles essaient de dessouder les bancs : “Karivendze !”, nous ne voulons pas d’étrangers, crient-elles. Un homme accompagné d’un bacoco (vieux monsieur), s’oppose, leur criant en shimaoré et en français : “Laissez les malades tranquilles. Je me suis battu pour avoir cet équipement. Nous ne combattons pas contre quelqu’un là, mais pour Mayotte française”.
Destruction des sandwichs
Un peu plus loin, les bacs de sandwichs et de sodas que des vendeuses à la sauvette avaient abandonnés dans la précipitation, n’ont pas eu la même chance: balancés dans la rue, les canettes éventrées, seront une perte sèche pour cette journée. “Ça devait arriver!”, lance fataliste, un manifestant.
La manifestation est partie pour durer “la journée”, selon Maoulida Momed, initiateur du Civirevos (Citoyens Vigilants révoltés de Sada) et membre du collectif anti-gratuité des visas qui n’est pas encore baptisé, “nous appuyons nos parlementaires qui pourraient être divisés, comptant deux ‘macronistes’ dans leurs rangs. Nous demandons le retrait de la feuille de route, quitte à réécrire la même, mais avec les Mahorais.”
La rédaction
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