Dès le portail d’entrée, la ministre était accueillie par des drapeaux du syndicat Sud et des revendications affichées haut et fort à coup de banderoles et de dossards : « Bienvenue en Sous-France », « Surcharge de travail, augmentation des effectifs », certaines plus trash, pointant directement l’engorgement par les étrangers en situation irrégulière, « Tout allait bien, quand, tout à coup, ils sont arrivés, manque de sécurité, personnel en danger, l’hôpital est malade !!! Je travaille, tu travailles…. Ils profitent », ou plus accès sur le manque de personnel, qui implique que « l’infirmier diplômé d’Etat devient pharmacien ».
Avec chacun la ministre échangera un petit mot, avant de récupérer l’ensemble des revendications, et de lâcher un peu plus tard, « je comprends que le manque de personnel aboutit à un glissement des tâches. » C’est à dire que les agents hospitaliers effectuent des tâches pour lesquelles ils ne sont pas compétents, comme nous l’explique un aide-soignant : « J’effectue des glycémies capilaires, ce qui est interdit dans le protocole de ma profession. »
« Sur le fil du rasoir »
Lors de sa visite d’installations aux normes, la visite entendra Catherine Barbezieux, la directrice du CHM lui expliquer, malgré les temporisation du directeur de l’Agence Régionale de Santé Océan Indien (ARS OI), que beaucoup de postes sont occupés par des remplaçants, « en raison d’un turn over très importants », et plus loin, une infirmière lui expliquer être dépassée par les 47.000 consultations médicales par an, « qui ont augmenté de 5.000 en une année », Zabibou Moedanze, Coordinatrice maïeutique, expliquer que les 800 naissances du centre se faisaient sans anesthésiste, sans gynécologue et sans pédiatre, une cadre de santé rapporter les difficultés de se procurer des poches de sang, le pharmacien raconter les 100 patients qui viennent chaque jour chercher des médicaments , « dont 70 à 80% ne sont pas affiliés. Nous faisons de l’humanitaire ». Que résumait Catherine Barbezieux : « Nous sommes en permanence sur le fil du rasoir ».
Face à cette situation de crise, la ministre nous a expliqué ne pas être venue avec des annonces : « Je viens compiler les informations pour bâtir un Plan Santé spécifique pour Mayotte, ce que j’ai entendu et vu aujourd’hui, je ne pourrai pas l’oublier. Je réfléchis à des mesures spécifiques ».
Ne pas brader la santé
Deux solutions s’offrent à elle. Soit proposer des dérogations pour officialiser en quelque sorte ce glissement des tâches, au risque d’être en rupture avec la sécurisation du circuit du médicament en cours à Mayotte, qui permet sa délivrance par des professionnels. Soit mettre les moyens humains et financiers comme elle vient de le faire avec les 50 millions d’euros accordés au CHU de La Réunion.
Les statistiques STATISS de l’ARS avaient traduit en chiffre le ressenti des personnels hospitaliers. Il ne faudrait pas qu’un Plan Santé, placé sous l’autorité d’une ARS qui octroie comme nous le soufflait le député Kamardine, 93% de ses ressources à La Réunion et 7% à Mayotte, ait la lenteur d’application du Plan Sécurité, sans quoi les mouvements sociaux risque de se prolonger, les agents ont déjà averti.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
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