La formation professionnelle est de la compétence de la région, donc du conseil départemental à Mayotte. Qui recevait pour cela une compensation de l’Etat, qui a basculé vers les fonds européens désormais.
Tous les ans, le conseil départemental est très attendu sur son appel d’offre de formation de la jeunesse de l’île. Une orientation de leur activité de l’année pour les 60 organismes de formation professionnels (OF) de la place, « dont la moitié y consacre leur activité principale, et qui doivent organiser leurs stages », explique l’un d’entre eux.
Et si tous les ans, le CD se fait tirer l’oreille avec une commande tardive autour du mois d’août, cette année 2017 bat tous les records avec de multiples reports, dont la grève des agents n’est pas étrangère, mais pas seulement. Résultat, elle n’est toujours pas sortie en cette fin du mois d’octobre, « ils viennent de nous dire qu’elle est repoussée au 3 novembre », déplore l’ensemble du secteur.
Perte des acquis
Les possibilités restent limitées à Mayotte pour les jeunes qui terminent chaque année en juin leur cursus scolaire. Les places au Centre Universitaire sont comptées, et beaucoup ne peuvent y accéder faute de niveau scolaire suffisant. Reste donc la formation avec des spécialisations à la clef.
« Certains ont commencé des formations en savoir de base, et devraient pouvoir enchaîner sur des stages de pré-qualification et de qualification. En attendant plusieurs mois au chômage, ils perdent le bénéfice des acquis, et nous risquons nous-mêmes de les perdre dans la nature, et de les voir s’exclure de la vie sociale », constate un autre organisme de formation professionnelle.
L’enveloppe tourne autour de 6 millions d’euros, à cofinancement Fonds social européen-conseil départemental, sur une clé de répartition 85%-15%. D’ici à ce que le Département tente ainsi d’économiser une année d’investissement dans la formation, il n’y a qu’un pas… et surtout un pas de moins pour les jeunes en attente de formation sur un territoire où l’âge moyen est de 17,5 ans. D’autant qu’avec une révision à la baisse de l’offre à la mobilité de LADOM par le gouvernement, il va falloir au contraire intensifier les accompagnements sur place.
De grandes muettes
Dénonçant une situation compliqué de gestion de leur personnel en cette période d’incertitude, certains OF évoquent un avenir qui s’assombrit : « L’Etat qui avait compétence sur la formation dans les domaines de lutte contre l’illettrisme, du handicap ou de l’enfermement carcéral, qu’il va transférer au conseil départemental. Mais en sous-estimant l’enveloppe de compensation à 100.000 euros, au lieu des 800.000 euros habituellement investis. »
Les mêmes pointent la responsabilité de la direction de la commande publique, « ils ont 3 mois de retard », et critiquent le changement des critères d’attribution des marchés, « en favorisant les organismes les moins chers au détriment de la qualité de leurs prestations. » Bien que des instances représentatives existent, personne ne veut témoigner à visage découvert dans ce monde où gouverne la commande publique.
Mais aussi parce que les OF ne sont pas sur la même longueur d’ondes puisque d’autres imputent le retard à la passivité de la DAFPI (Direction de la formation professionnelle et de l’Insertion) du conseil départemental. En lien avec un manque de vision politique de la jeunesse du département.
Qui pourrait trouver une issue, et là-dessus, ils sont tous d’accord, par la mise en place d’un Plan pluriannuel de formation, toujours annoncé, et toujours repoussé… un air connu au CD !
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
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