“Des enfants dorment par terre, sur le carrelage, et mangent dans les sanitaires” s’indigne Bertrand, un instituteur de Petite Terre qui dénonce l’absence de salle de repos pour les élèves de maternelle et de réfectoire. “Dans toutes les maternelles, la sieste est obligatoire. Si les élèves font 7 heures à midi, ils peuvent dormir chez eux. On demande donc à pouvoir appliquer les rythmes scolaires quand les conditions seront réunies.”
Ce mardi matin devant le vice-rectorat, plus d’une centaine de manifestants, instituteurs et parents d’élèves de toute l’île manifestaient contre ces “rythmes s’colère”, une “réforme métropolitaine” appliquée “bêtement” selon le syndicat Sud.
Rafza Youssoif, présidente de la confédération syndicale des familles demande “la suspension” de cette réforme “tant que les conditions ne sont pas réunies. On manque de cantines, de réfectoires” appuie-t-elle.
Parmi les écueils dénoncés, la cohabitation entre les rythmes scolaires et le système de rotation lié au manque de classes. “Ce ne sont pas des rythmes scolaires puisqu’il y a une arythmie dans la semaine, la chronobiologie n’est pas respectée, analyse Yannick Samson, de la CGT premier degré qui note “un manque de sommeil et des troubles de l’apprentissage. On voit les deux extrêmes, soit la léthargie, soir l’hyperactivité. On doit faire plus d’autorité alors qu’on est payés à faire de la pédagogie. Ca devient de la maltraitance car avec des journées qui sont passées de 5 heures à 9 heures à l’école, ils sont en burn-out.” “Mon fils est crevé, confirme la maman d’un élève de CM2. Quand il rentre à 16 heures, il s’endort.”
Elèves et enseignants épuisés
Et ce qui vaut pour les élèves vaut aussi pour les enseignants. Plusieurs manifestants notent qu’avec les rotations, un professeur qui vit dans le sud et travaille à Mamoudzou part de chez lui vers 5 heures et revient à 19 heures. “Ils sont épuisés, et ne contrôlent plus la situation, on déplore des accidents de la circulation” poursuit le CGTiste qui évoque aussi “viol et agressions” sur le chemin de l’école. “Un fonctionnaire doit obéir, mais il doit aussi savoir réagir quand il s’agit de vies humaines” poursuit-il, justifiant la grève.
Du côté du vice-rectorat, le bilan, est moins tranché. “Ce n’est tout blanc ni tout noir, nous explique le cabinet du vice-rectorat, les choses se mettent en place. Il y a plusieurs endroits où les rythmes scolaires fonctionnent comme M’Tsamboro 3, Chirongui, Petite Terre ou Mamoudzou. Le vice-rectorat a fait un gros travail avec les communes.” Pour la sieste et les repas par exemple, Chirongui a acheté des frigos et des matelas. D’autres communes font appel au traiteur Panima pour avoir des repas à proposer aux enfants. Dans d’autres communes “on est en attente de construction de farés”.
En outre, l’administration rejette l’argumentaire de certains manifestants associant rythmes scolaires et écoles en rotation. “On a décidé de ne pas mettre en application les rythmes scolaires dans les écoles qui fonctionnent en rotation”. Ce qui représente 26% des écoles selon les chiffres du cabinet. Dans les autres établissements, 38% appliquent les rythmes scolaires sur 9 demi-journées, soit une après-midi libérée, et 36% font la semaine des quatre jours. “On essaye de faire progresser le système, tout ne se fait pas en un claquement de doigts, mais le tableau n’est pas aussi noir que ce qu’on peut entendre, c’es très varié.”
En fin de matinée, les manifestants ont été reçus à la préfecture par le sous-préfet Dominique Fossat accompagné du directeur académique adjoint Christian Giraud. Réunion à l’issue de laquelle l’intersyndicale a émis le communiqué suivant :
“Pour l’État, il n’est pas question de revenir au dispositif antérieur, contrairement à ce qui s’est passé dans d’autres communes de la France métropolitaine. Cependant, le Sous-Préfet a indiqué qu’il sera possible de revoir les horaires d’entrée et de sortie des écoles dans le cadre de la révision des projets éducatifs territoriaux (PEDT). Les organisations à l’initiative de l’appel pour un retour aux « 5 heures d’affilée » estiment la proposition de la préfecture insuffisante puisque la demande principale n’a pas encore été entendue et reconduisent le mouvement le 5 décembre prochain. Les maires devront désormais « rentrer dans la danse » et se positionner très clairement par rapport à la demande des parents d’élèves et des enseignants du premier degré.”
Rythmes scolaires, ça rime décidément aussi avec bras-de-fer.
Y.D.
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