Les élus ont tenté de se rendre en Petite Terre pour entamer les échanges avec les missionnaires. Avec succès pour quelque uns. Ce ne fut pas le cas du président du Département Soibahadine Ramadani, bloqué à un barrage, et du député Mansour Kamardine, chahuté verbalement par un barragiste.
Un positionnement des élus, dont 7 maires** et un conseiller départemental présents, sur lequel s’explique Saïd Omar Oili, président de l’Association des Maires de Mayotte. Qui prend sa source dans un sentiment de gâchis, issu de la rencontre avec la ministre Annick Girardin le mardi 13 mars dernier.
« L’Intersyndicale et le Collectif ont voulu engager la discussion, et ont rajouté 15 points à la Plateforme sortie par la ministre, qu’elle a approuvés. Ils ont ensuite proposé la suspension de la grève d’un mois, et nous avons quitté la salle sur cet accord. J’ai eu un peu mal à la tête le lendemain en entendant le revirement, et les insultes à notre encontre alors que n’y étions pour rien ! », se souvient le maire de Dzaoudzi, qui illustre leur sentiment par un dicton mahorais, “Le trou fait par des paroles est plus difficile à refermer que celui fait par la main”.
Nomination d’un Coordonnateur de LIC
Les élus eux, restent sur la position commune initiale, « nous avions donné notre parole », et le président de l’Association des maires propose au gouvernement des amendements demandés. Il estime que le gouvernement de son côté a donné des gages d’avancées : « Tout d’abord, un Coordonnateur de lutte contre l’immigration clandestine a été nommé à la préfecture ». Il s’agit de Christophe Deschamp, sous-préfet de l’arrondissement de Bar-sur-Aube, qui a notamment exercé en Guyane.
Ainsi que deux autres points : « Des actions de lutte contre la délinquance et des opérations contre l’immigration clandestine sont menées dans les communes, et le bureau des étrangers, bien qu’actuellement en grève, est officiellement fermé pendant un mois. Donc, nous devons suspendre et travailler », déclare-t-il.
Se pose la question de leur légitimité par rapport au mouvement, soulevée par certains maires, étant donné que les barrages perdurent : « Pour ma part, c’est celle de mon élection. C’est mon devoir auprès de la population d’ouvrir les écoles et les mairies, ce qui n’empêche personne d’exprimer son mécontentement. » Il invite à « éviter le populisme, « même si nous soutenons le mouvement, nous devons travailler avec le gouvernement comme avec l’intersyndicale. Beaucoup d’entre nous manquent de courage politique, il faut prendre ses responsabilités », appelle Saïd Omar Oili.
« L’humiliation de Tsingoni »
Le préfet Brot a de son côté exprimé aux élus « l’humiliation subie à Tsingoni », « l’attente, sans la présence du maire ». Un maire, Mohamed Bacar, premier vice-président de l’AMM, et qui restait jusqu’à présent à cheval entre deux positions, celle de l’intersyndicale et celle des élus… tout en étant le porte-parole de ces derniers.
Jean-Jacques Brot, ancien préfet de Mayotte s’envole loin de l’île ce mardi et atterrit pour le conseil des ministres de mercredi, « pour rendre compte des travaux et des propositions au premier ministre et à la ministre des Outre-mer », rapporte la préfecture de Mayotte. Le général Lucas reste encore une semaine, pendant laquelle il compte faire la tournée des mairies, pour rappeler aux élus leurs pouvoirs, notamment en tant qu’Officier de police judiciaire.
Ce fut donc une première prise de contact « qui en appelle d’autres ». Les élus rapportent que trois séquences de travail ont été actées sur la base de la plate-forme signée par la ministre et la méthode précisée par le premier ministre dans son courrier d’hier: “La poursuite des opérations de sécurisation et de LIC, l’élaboration d’un plan de rattrapage pour le développement de l’île, et la révision du système de gouvernance pour mettre fin aux dysfonctionnements des services de l’Etat au niveau local.”
Du côté du mouvement, le Collectif a appelé à l’apaisement sur les barrages, et veut rester dans le consensus avec les élus et les syndicats, « nous espérons la venue d’un émissaire, c’est notre condition pour lever les barrages », indique Foumo Silahi, membre du Collectif des Citoyens de Mayotte.
Pendant ce temps, la situation se tendait fortement à Dzaoudzi ce mardi soir, où les passagers de la barge habitants Petite terre se voyaient refuser le passage sur le barrage du Boulevard des Crabes.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
* Les Etrangers en situation irrégulière viennent en nombre y chercher des pièces justificatives pour obtenir leurs papiers
** Les maires présents à la réunion sont ceux de Dzaoudzi Labattoir, de Mamoudzou, de Sada, de Bandrelé, de Koungou, de Pamandzi, ainsi que Sidi Mohamed, conseiller départemental, représentant le président Soibahadine.
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