Pour cela, il faut remplir au moins deux conditions : avoir été licencié sur son île, et remplir les minimas de performance.
Sous une apparence anodine, la première a fait l’objet d’intenses tractations depuis deux ans. Les îles membres Seychelles, Mayotte, Maldives, Réunion, Madagascar, Comores et Maurice avaient du mal à se mettre d’accord à la suite d’un casse sur les médailles : « Beaucoup de métropolitains qui se revendiquaient comme Réunionnais ou Mahorais avaient raflé les médailles. Les autres îles ont réagi en demandant de durcir le règlement », rapporte Madi Vita, président du Comité Régional Olympique et sportif (CROS).
Pour éviter les naissances spontanées de Kéropolitains ou de Mahopolitains, le curseur avait été poussé à fond par le Conseil International des Jeux (CIJ) pour inverser la tendance, l’article 7 de la Charte des Jeux précisait à son alinéa 2 qu’il fallait « être licencié auprès du mouvement sportif de l’île durant trois années civiles continues incluant celle des Jeux » et «Avoir été au moins cinq ans dans l’île». Les Réunionnais avaient monté le ton, dénonçant par ailleurs des naturalisations opportunes par les autres îles, et menaçant en avril 2017 de boycotter les Jeux de Maurice.
Finalement, les amendements proposés par La Réunion ont été adoptés en février 2018 par le Conseil international des Jeux, Mayotte n’ayant toujours pas le droit de vote, (condition qu’ont fait imposer les Comores pour que notre île intègre la compétition). Désormais, en plus d’avoir la nationalité française, il faut avoir été licencié au moins 12 mois sur son île sur toute sa carrière sportive. Un an, c’est à dire que les Mahorais qui se sont toujours entrainés en métropole, sans avoir été licencié à Mayotte, devront avoir pris leur licence avant le mois de juillet 2018 pour participer, la 10ème édition des Jeux se tenant du 19 au 28 juillet 2019 à Maurice.
Le javelot en pointe
Si Madi Vita n’est pas inquiet, « la moitié de nos jeunes évoluent en métropole, ils ont été licenciés à un moment donné à Mayotte », ce n’est pas le cas de tout le monde. Spécialement dans la discipline reine qu’est l’athlétisme, « où les périodes de mutation sont bien précises, de septembre à octobre, et il n’est pas possible d’être licencié à deux clubs différents », nous confie un entraineur. « Or, sur 7 médaillés de 2015, seuls 3 sont inscrits dans des clubs Mahorais, tous trois lanceurs de javelot. Les autres n’ont pas effectué cette mutation pour être affilié à un club mahorais, et ne l’ont jamais été bien qu’étant nés à Mayotte. » Des mutations qui peuvent coûter cher aux clubs accueillant, étant donné le niveau des sportifs concernés tels que Djassim Ahamada, médaillé d’or en saut en longueur aux JIOI 2015 ou Nasrane Bacar, médaillée de bronze au 100m. Des ex-médaillés pourraient donc se retrouver exclus de la compétition…
D’autres craignent des inscriptions pour « faire illusion », « dans des spécialités comme le 5km marche ou le semi-marathon, on peut envoyer des personnes qui ne remplissent pas les critères de performance. » Ces « minimas » sont une condition sine qua non dans les autres disciplines, comme nous l’explique Patrick Bonfils, directeur de la Jeunesse et des sports (DJSCS) Mayotte : « Tous ne remplissaient pas ces minimas, la liste a donc dû être revue à la baisse. Sur 265 athlètes potentiels, environ la moitié partira en délégation. »
La liste que nous a fourni le CROS comprend 173 sportifs, sans compter l’encadrement et les juges arbitres, « le nombre d’accompagnants est très règlementé », précise Madi Vita.
Conformément à la Charte, les Mahorais ne défileront toujours pas sous les couleurs du drapeau français, mais de celui des jeux des Iles, dont l’hymne résonnera pour la médaille d’or, à la place de la Marseillaise, « faire évoluer tout ça, c’est le domaine de la diplomatie, pas le nôtre, nous nous conformons donc au règlement actuel », rapporte Madi Vita.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
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