L’Institut d’Emission des Départements d’Outre-Mer vient de nous livrer dans son dernier bulletin de septembre et dans son tableau de bord (Lire Tendances_conjoncturelles_2t2018_mayotte_vff, et Tdb IEDOM mayotte 2t18), les tendances économiques marquantes du territoire du 2ème trimestre 2018. Après un début d’année touché par la mobilisation sociale et les blocages de l’économie qui a découlé, on y voit deux signes encourageant : un indicateur du climat des affaires (ICA), donc du moral des entrepreneurs, qui repart à la hausse, +8,7%, et un renforcement des importations.
Mais aussi deux sources d’inquiétude, des crédits d’investissement en berne, à première vue incohérent avec la hausse de l’ICA, et des importations de ciment en chute depuis mi-2017.
L’IEDOM s’explique la reprise du moral des entrepreneurs peu traduite dans les investissements (-3,8%, mais +7,4% sur un an), par une « prudence quant à l’évolution de la conjoncture qui a fragilisé fortement la trésorerie des entreprises ».
La tendance la plus aléatoire à interpréter, est celle du nombre des demandeurs d’emploi, cette fois en baisse au 2ème trimestre de 1,3% sur le précédent. On suppute qu’elle est liée à la poursuite du rétrécissement du « halo », zone flou qui intègre des demandeurs d’emploi non inscrit à Pôle emploi, qui régulariseraient alors leur situation. Mais aussi, plusieurs centaines de demandeurs d’emploi n’ont pu accéder aux différents services de Pôle emploi en mars-avril, « enrayant ainsi leur possibilité de renouveler leurs dossiers au deuxième trimestre ». L’IEDOM y voit toujours davantage « un rattrapage de déclarations administratives qu’une évolution du marché de l’emploi conforme à la réalité ».
Rattrapage d’après secousse sociale
L’accroissement des importations, de 10,4% par rapport au trimestre précédent, est un bon signe, car elle est généralement la conséquence d’une activité économique qui se porte bien. Mais au regard des secousses de la mobilisation sociale en première partie d’année, il s’agit pour une large part d’un rattrapage, avec « un report important du 1er trimestre ».
Lorsqu’on regarde plus en détail, on s’aperçoit que les importations de biens d’équipement du foyer et de produits courants augmentent fortement (+38,8 % et +16,5 % par rapport au premier trimestre). De même, le nombre d’immatriculations de véhicules neufs augmente de 24 % par rapport au trimestre précédent, mais ils avaient chuté de prés de 20% au trimestre précédent. Les importations touchant l’industrie agro-alimentaire progressent de 17,6%. Donc les produits de consommations courantes ont bénéficié d’un rattrapage après le coup de frein, les rattrapages en cours de prestations telle l’Allocation Personnalisée d’Autonomie ou l’aboutissement de l’indexation de 40% des indemnités des fonctionnaires n’y sont certainement pas étrangers.
Morosité sur le ciment
Les importations de biens d’équipement professionnel se contractent de 11,3 %. Les importations de ciment sont stagnantes, et elles avaient également chuté les trimestres précédents, depuis un plus haut mi-2017. C’est plus inquiétant, car si le bâtiment ne va pas… Toutefois, les entrepreneurs du secteur du BTP « anticipent un retour favorable de l’activité au trimestre prochain, accompagné d’une amélioration des soldes de gestion. La hausse des indices des prix du bâtiment et des travaux publics sur le trimestre (respectivement +2,4 % et +0,8 % par rapport au trimestre précédent) pourrait leur permettre d’embaucher. » Et les dotations des politiques de construction de logement sociaux dans le cadre du Plan avenir Mayotte, et de la résorption contre l’Habitat indigne également.
Bien qu’ils soient encore anormalement longs, on note une moindre détérioration des délais de paiement. Le secteur industriel est le seul à déclarer une amélioration d’activité ce trimestre, après de fortes baisses accusées aux trimestres précédents, celui du commerce est plus nuancé, mais « l’amélioration des délais de paiement les incite à espérer un retour favorable de l’activité ».
Du côté des crédits, les entrepreneurs ont eu massivement recours aux crédits bancaires d’exploitation, destinés à renflouer leurs trésoreries après le blocage de l’économie qui les avait mises à mal, avec une « perte conséquente de chiffre d’affaires ». Si davantage de crédits aux collectivités locales avaient été distribués en 2017, et début 2018, ils sont en chute au 2ème trimestre,
Dernière tendance, le nombre d’interdits bancaires est en chute libre, de 5,3 % sur un an, tout comme celui des retraits de cartes bancaires, -14,5% sur la même période.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
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