Pour Djalil Gangate, avocat réunionnais du maire de Mamoudzou, les réquisitions sont ” lourdes”. Le premier magistrat risque selon les réquisitions du procureur Camille Miansoni 18 mois de prison avec sursis, assortis de 15 000€ d’amende et 3 ans d’inéligibilité. Il joue son poste de maire. Le directeur général des services de la Ville risque quant à lui 18 mois avec sursis et 10 000€ d’amende. Les peines requises vont ainsi dé-crescendo jusqu’à 8 mois avec sursis et 3500€ d’amende pour l’agent qui avait la position hiérarchique la plus basse des 7 prévenus. La Ville de Mamoudzou quant à elle pourrait se voir infliger 50 000€ d’amende.
Des réquisitions exemplaires qui s’inscrivent dans la droite ligne de celles prononcées pour le même délit envers l’ex directeur du Smiam. Et si Mohamed Majani est le plus lourdement visé, c’est que l’on “sait que tout remonte à lui, estime le procureur. Car il est l’autorité à qui incombe la responsabilité du marché. Il a été informé, il voulais construire, c’est lui qui a transmis les documents destinés au contrôle de légalité de la préfecture”.
Au maire comme aux autres prévenus, la justice reprochait de nombreuses irrégularités quant à l’attribution du marché de la rénovation de la mairie annexe de Kawéni. Entreprises retenues sans répondre aux exigences, notes modifiées en cours de procédure, avances crevant le plafond autorisé et surtout, ce courrier du préfet qui note les irrégularités et somme le maire de retirer le marché, missive laissée sans réponse.
Le parquet lui impute ainsi notamment “la décision d’attribuer 30% d’avance aux entreprises, plusieurs entreprises présentes ont entendu la validation par le maire”. Lui pourtant, affirme que “cette conversation n’a jamais eu lieu en ma présence”, il nie avoir accordé cette avance six fois supérieure au maximum légal de 5%. Une déclaration qui tranche avec le communiqué que le maire signait il y a un an dans nos colonnes, dans lequel il assumait au contraire ces avances écrivant “le montant de cette avance peut aller de 5 % à 30 % maximum du montant total des travaux.” Communiqué dont le président Rodriguez n’a pas manqué de rappeler l’existence.
Le maire assure toutefois qu’en qualité de “responsable de la commune” il a “pris la leçon de tout ça”. “Je pense que ce marché était irrégulier, il y a eu des erreurs” lâche-t-il à la barre.
Il ressort de l’instruction que la volonté d’aller vite dans les travaux ont amené à une succession de choix discutables. Au moins la Justice n’a-t-elle pas trouvé de trace d’enrichissement personnel ou de prise illégale d’intérêt dans cette affaire, qui se présente plutôt comme un procès de l’incompétence ou à tout le moins selon le procureur “de la désinvolture” des prévenus.
A l’issue d’un procès de près de 8 heures, le procureur a déploré la stratégie des coprévenus consistant à “se dédouaner”. Il dénonce “une dilution des responsabilités” et qualifie l’affaire “d’emblématique” à Mayotte où “il est nécessaire que les décideurs soient respectueux des deniers publics”.
En début de soirée, les avocats rassemblaient leurs dernières forces pour plaider la relaxe de leurs clients respectifs, arguant soit de leur position hiérarchique, soit de détails de droit, tout en étant conscients, lâche un avocat pendant une suspension, que la gestion de ce dossier n’était “ni fait ni à faire”.
Y.D.
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