En annonçant la candidature de Mayotte comme organisatrice des Jeux des Iles de l’océan Indien pour 2027, le président du conseil départemental Soibahadine Ibrahim Ramadani a déclenché un effet domino. On a commencé à compter sur les doigts d’une main les équipements en état, pour en multiplier le résultat par 4 afin d’obtenir le score des médailles décrochées par les sportifs de l’île, « de 2007 à 2015, Mayotte a obtenu 19 médailles, quand il y en a eu 610 à La Réunion, 472 à Madagascar et 27 pour les Comores. Nous sommes donc derrière les Comores ! », un constat dressé par le même président lors du lancement des Assises du sport en présence de Jean-Marc Mormeck, Délégué interministériel pour l’Egalité des Chances des Français en outre-mer.
Ces Assises sont le droit fruit de ce remue-ménage, et lors du lancement, avait été fait sans ambages un constat du manque de volonté politique. Pas étonnant donc que le thème revienne lors de cette première journée de lancement des tables rondes au sein du collège de Majicavo.
« Obtenir des financements pour se doter d’équipements, c’est bien, mais sans formation des dirigeants, c’est comme acheter une Ferrari sans avoir le permis », lâchait Madi Vita, président du Comité Régional Olympique et Sportif (CROS), qui attend de ces Assises qu’elles permettent de procéder au rattrapage dans ces deux domaines. Pour cela, un outil, le Schéma Directeur du développement du sport qui doit être signé par l’ensemble des partenaires du CROS, « c’est notre unique objectif ».
« Arrêter de faire à la mahoraise »
Les thèmes des tables rondes vont permettre de ne pas parler que de compétition, mais aussi de « sport santé », qui est à la recherche d’actions concrètes, de « sport Nature », d’Equipements sportifs, de « sport et cohésion sociale », ou de formation et d’emploi.
Les échanges devraient aussi permettre de ne parler que d’une seule voix de Mayotte au plan national, « et non comme ce fut le cas aux Jeux des Iles de Djibouti où les contradictions étaient apparues entre les deux niveaux, local et ministériel », toujours sur le problème d’affichage de la nationalité française de Mayotte, en matière de drapeau et d’hymne. « En juin, nous devrions signer un document sur ce sujet, pour que ce ne soit plus un élément bloquant », à suivre donc. Car la priorité c’est bien « d’arrêter de faire ‘à la mahoraise’ », pour « monter des dossiers solides. C’est ce que nous avons fait pour 2027. »
Le signe encourageant, c’est un changement d’attitude, avaient souligné les acteurs lors du lancement des Assises avec Jean-Marc Mormeck, « on sent une volonté politique à aller dans la bonne direction ».
Un bon médium serait de s’appuyer sur l’UNSS qui reste la porte d’entrée des sportifs à Mayotte avec les 100.000 élèves scolarisés cette année, dans un sorte de continuité « de l’école au club », comme l’aime à rappeler son directeur Hervé Curat, qui, en tant que représentant du vice-rectorat, se disait fier d’accueillir au collège de Majicavo cet événement.
Des Assises à un moment crucial
Ce grand vide s’explique aussi par le contexte, expliquait Dominique Fossat, sous-préfet à la Cohésion sociale, qui, sans excuser les retards, mentionnait son échange avec Marc Sanchez, président de l’Association nationale des élus en charge du sport (ANDES), de passage à Mayotte, et notamment à Acoua : « Il faisait remarquer qu’on s’intéresse habituellement au sport quand on a fait le reste. Et ‘le reste’ ici, c’est tout, la voirie, l’assainissement, la scolarité. C’est encore plus difficile qu’ailleurs de faire passer le message de l’utilité du sport. »
Mais ce département n’est pas comme les autres, « avec les moins de 17,5 ans qui représentent la moitié de la population, le sport devient un élément des politiques publiques. »
Pour le représentant de l’Etat, ces Assises arrivent à un moment triplement important : « Celui de la mise en place du Plan Avenir pour Mayotte consécutif à la mobilisation sociale, celui de la signature des Contrats de Plans sur les investissements publics, et enfin, celui de la projection de Mayotte 2027 des Jeux de l’océan Indien. »
En écho à l’image de la Ferrari sans conducteur, il évoquait les MJC jadis flambant neuves sans animations pour les faire vivre qui sont désormais délabrées, « le plan de rattrapage du sport ici doit donc se faire en concertation avec tous les auteurs, c’est le sens de ces séances de travail qui doivent déboucher sur des résolutions opérationnelles. » Et ne pas oublier de budgétiser l’entretien des installations.
Pour assister aux tables rondes de ce samedi, portant sur la Cohésion sociale et sur le Sport Nature, et dimanche sur le Sport-performance et le Sport-formation et emploi, consulter le Programme Assises du sport
Anne Perzo-Lafond
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