Avec la loi Elan, le gouvernement a fait feu de tous bois. Urbanisme, constructions, logements, numérique, le projet de loi de 64 articles présenté il y a un an en conseil des ministres, en compte finalement quatre fois plus depuis son adoption.
A Mayotte, ce “mastodonte législatif” comme le décrit l’universitaire Vincent Le Grand, spécialiste du droit de l’urbanisme, aura des conséquences notables. Certains articles n’auront certes que peu d’impact, mais d’autres ont été conçus spécialement pour le 101e département. C’est pour ne pas se perdre entre les lignes de ce pavé indigeste que les élus et techniciens du département se forment, avec le soutien du CNFPT, centre national de formation de la fonction publique territoriale.
La journée d’information initiée ce jeudi était impulsée par Denis Chopin, DGA à la mairie de Mamoudzou. La loi aura selon lui un “impact tellement fort pour notre territoire qu’il nous faut de l’aide”. Sa volonté est “d’identifier les éléments importants de cette loi applicables à Mayotte”.
Certains éléments clés de la loi auront ainsi peu d’impact à Mayotte, contrairement au reste du pays. L’obligation pour les petits bailleurs sociaux de se fédérer n’a pas lieu d’être à Mayotte où la SIM est seule sur l’échiquier. Les modifications apportées à la loi Littoral, qui donnent désormais aux maires plus de pouvoir sur les constructions côtières n’aura pas d’impact ici puisque le littoral est propriété de l’Etat, selon le principe dit des “pas géométriques”, et géré par le conservatoire du littoral.
Autre changement notable, une association ne pourra contester un projet de construction en justice que si elle existait avant le dépôt du projet, afin de lutter contre les “associations d’opportunisme”. En clair, il ne sera plus possible à des riverains inquiets de se constituer en association en apprenant ce qui va se construire devant chez eux.
La loi Elan vient aussi restreindre fortement les dispositions de la loi de 2005 sur le handicap, qui prévoyait l’accessibilité dans toutes les nouvelles constructions. Désormais, seuls 20% des projets immobiliers devront être accessibles aux personnes à mobilité réduite. Peu d’impact à Mayotte où peu de bâtiments sont actuellement aux normes. Mais ce changement pourrait peser dans les nombreuses constructions de logement prévues par le Plan pour Mayotte, notamment en réduisant les coûts.
Autant de questionnements soulevés par Aude Chasseriau, venue de la communauté de communes de Terre de Montaigu en Vendée pour “questionner la loi Elan, co-construire des pistes de travail” et, faute de recul faire “de la projection” sur ses conséquences pour Mayotte.
Dans notre département, “la grosse problématique, c’est la construction illégale” rebondit Arnaud Boulard, chef de service à la Deal en charge de l’aménagement durable. La loi Elan prévoit ainsi “suite à l’engagement pris dans le cadre du plan pour Mayotte d’étendre les pouvoirs du préfet pour lutter contre l’habitat illégal”. Une disposition construite pour Mayotte, et étendue à la Guyane.
Si les destructions de bangas étaient jusqu’à présent le fruit de décisions de justice, ou d’actions en flagrance, ces nouveaux pouvoirs étendus donnés au préfet de Mayotte devraient être mis en œuvre “dans les prochaines semaines” avec une première destruction de bangas prévue dans le cadre de cette nouvelle réglementation. Ce qui en langage officiel se traduit par “une action volontariste du préfet, en appui des communes, pour lutter contre l’extension des bidonvilles”.
Y.D.
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