Face au « violentiavirus », les élus départementaux s’impatientent. La séance plénière de ce mardi sur le Débat d’orientation budgétaire pour l’année 2020 a été l’occasion de demander des comptes sur les actions entreprises en faveur des jeunes.
L’interpellation est venue de l’opposition, notamment de l’ex-président Daniel Zaïdani, mais aussi de membres frangeants de la majorité, comme Raïssat Andhum. Le premier, élu de Pamandzi, laissait aller sa colère, « le contexte social se dégrade à quelques mois de la fin de votre mandat, et je n’ai pas le sentiment que le conseil départemental soit en ordre de bataille. Depuis 5 ans, nous louons des bâtiments destinés à l’action sociale en Petite Terre, sans qu’elle soit mise en place. Or, vendredi dernier, le collège de Pamandzi n’a pas ouvert, victime de la présence de bandes venues en découdre. Vous avez une grosse responsabilité ! », lançait-il à l’adresse du président Soibahadine Ibrahim Ramadani.
La seconde, vice-présidente en charge de l’Aménagement, émettait la même critique sur son canton, « cela fait 5 ans que je me bats pour faire ouvrir une antenne de la cité des métiers à Koungou, il faut qu’on s’interroge sur notre responsabilité ! »
Enfin, si Nomane Ousseni, conseiller de Sada, reconnaît les efforts de la majorité de l’exécutif dans ce domaine, il en demande plus : « Koungou, Kawéni, Kahani, Petite Terre… Les actes d’incivilités et les violences gagnent du terrain, il faut faire le point sur ce qu’on a déjà mis en place et ce qu’il faut améliorer. On sait que l’Etat est fautif, notamment pour avoir reconduit des parents sans leurs enfants, et si un effort sans précédent a été fait par le conseil départemental avec une bonne vision politique depuis 5 ans, il faut décider de ce qui sera alloué au budget de 2020 pour mettre en place des actions. »
« Ça avait fait râler nombre d’entre vous ! »
Pour comprendre la dégradation de la situation d’une jeunesse livrée à elle-même, il faut rappeler qu’il y a encore 7 ans, le social ne représentait que 6% du budget du Département. Oui, 6%, alors que c’est sa compétence première. « Nous avons tellement amélioré le budget de l’action sociale, que ça avait fait râler nombre d’entre vous ! », rappelait ce mardi l’élu de Mamoudzou 1, Sidi Mohamed. Plusieurs de ceux qui s’offusquaient ce mardi matin, ont en effet par le passé reproché de débloquer des millions pour les mineurs isolés, sous entendu clandestins. Une posture qui a figé pendant longtemps les politiques sociales à mener envers la jeunesse.
Le président Soibahadine Ibrahim Ramadani surfait donc sur cette unanimité de circonstance pour proposer de relever encore le budget destiné au social, « nous devons faire mieux, et l’effort doit être conséquent. » L’orientation du budget est donc donnée sur ce dernier budget de la mandature, pour porter les dépenses du social à 50% du budget. Pour rappel, le conseil départemental doit assumer la charge de Département et de Région, et au titre de cette dernière, du développement économique notamment, qui prend une grosse part de budget.
Doté initialement de 120 millions d’euros en ressources, le budget Protection de l’enfance et de la santé, va donc être réévalué, avec une mise en garde sur les dotations pérennes de l’Etat qui ne sont qu’à 25 millions d’euros par an, et qui bénéficie encore du rattrapage de compensation de l’Etat depuis 2009.
Contrôle de l’efficacité des dispositifs
Nous avons repris l’interrogation de Nomane Ousseni, à l’intention de l’élu en charge du social, le vice-président Issa Issa Abdou, « relever le budget, mais pour quelles actions ? » Nous n’allons pas détailler de nouveau ce qui a été mis en place depuis 3 ans, Action Educative en milieu ouvert (AEMO), Tiers Dignes de confiance, Maisons d’Enfants à Caractère social, pour nous concentrer sur une des dernières mesures, la Prévention spécialisée.
C’est elle qui doit identifier les jeunes fauteurs de troubles, et leurs familles ou référents parentaux. « A la suite d’un appel d’offre, la Croix Rouge a été désignée pour effectuer ce travail à Dembéni, il est en cours. Après ce territoire test, nous avons décidé d’étendre le dispositif à l’ensemble de l’île, les associations compétentes viennent d’être désignées, il faut maintenant qu’elles commencent le travail de terrain. »
Il faut donc attendre que le travail initié donne ses fruits, alors que la rue n’attend pas. « C’est pourquoi dans un esprit de vigilance par rapport à tout ce que nous avons lancé, nous mettons sur pied un Comité de suivi qui va se réunir régulièrement et faire le point sur l’efficacité des mesures mises en place. » Il sera composé du conseil départemental, de la préfecture, de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ), « et de toutes les associations spécialistes du sujet, comme l’UDAF. »
Le président du Département de son côté maintient son souhait de mise en place d’une table ronde partenariale avec l’Etat et tous les acteurs du territoire, dont nous persistons à penser qu’il doit en être le leader.
Anne Perzo-Lafond
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