Pas de règlements de compte entre bandes rivales, quasiment plus de caillassage de voitures, en dehors d’une vingtaine de jeunes à Pamandzi la semaine dernière au rond point du Mekong… les forces de l’ordre peuvent se concentrer sur le difficile respect du couvre-feu territorial dans le cadre du confinement. Pour le général de gendarmerie Philippe Leclercq, ceci explique cela : « L’omniprésence des forces de l’ordre sur 9 points de contrôle et la menace de verbalisation ont eu raison des zones à problème, comme Koungou, hot-spot des entraves à la circulation pour racket. Nous sommes présents de 6h à 18h, et pendant le couvre-feu, de 20h à 5h du matin. Avec la consigne donnée d’agir avec discernement, un rassemblement de jeunes sera plus sévèrement traité que des gens qui prennent l’air en famille devant leur maison. »
Le juste dosage entre « la propagation du virus et permettre aux habitants de vivre » suit une directive, « que le Covid-19 ne pénètre pas dans les quartiers où les conditions précaires et la promiscuité faciliteront la contamination. » A commencer par les files d’attente pour les bouteilles de gaz, « nous faisons respecter les distances de un mètre, ça doit devenir un acte réflexe. »
Mais pour le général Philippe Leclercq, l’accalmie des violences concerne la délinquance visible, « nous sommes inquiets sur l’ampleur que pourraient prendre les violences intrafamiliales. Le dépôt de plainte reste un enjeu déjà difficile, qui se complique dans cette période de confinement où tout le monde est à la maison. Beaucoup de faits ne sont pas portés à notre connaissance. »
« Une porte de sortie de leur calvaire »
Des violences entre conjoints ou contre les enfants qui avaient explosé l’année dernière à Mayotte. La préoccupation est plus générale, et sur le plan national, le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner et Carine Wolf-Thal, présidente du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens, se sont entendus pour que durant cette période de confinement les victimes de violences intrafamiliales « pourraient se rendre dans la pharmacie la plus proche de leur domicile, où elles seront accueillies et où l’alerte sera immédiatement donnée auprès des forces de l’ordre. »
Un dispositif qui doit permettre aux victimes d’être prises en charge et de déposer plainte. « Chaque victime qui souhaite avoir recours à ce dispositif peut prétendre sortir de son domicile pour aller faire des courses et remplir l’attestation en cochant la case correspondante. Toutefois, il ne sera jamais reproché à une victime de violences intra-familiales parvenant à quitter son foyer de s’être échappée sans attestation », indique le ministère de l’Intérieur dans un communiqué.
Les pharmaciens pourront apposer une signalétique sur la porte de leur officine pour prévenir de l’existence de ce dispositif. Il est avant tout destiné aux femmes victimes de violences conjugales, « qui dans 80% des cas ont des enfants qui vivent au domicile familial. Il pourra également bénéficier à toutes les victimes de violences dans le cercle familial, à commencer par les mineurs. »
Pour les victimes, « c’est une porte de sortie de leur calvaire », indique Christophe Castaner, quand Carine Wolf-Thial souligne que le réseau des pharmacies permet une « disponibilité 7 jours sur 7, « les pharmaciens jouent quotidiennement un rôle d’accueil et d’écoute de la population, et ce en toute confidentialité. »
La faim comme moteur
Mais avec le confinement, les petits boulots et leurs lots de vente d’oignons, ou même les marchés ont disparu. Des habitants vont commencer à manquer de denrées alimentaires, mettait en garde le directeur de la DJSCS. Un cambriolage particulièrement violent s’est d’ailleurs déroulé dans la nuit de vendredi à samedi à la Communauté des frères du bon Samaritains, à Tsoundzou II. Elle fait office de gîte, pour financer un orphelinat au Congo. « Dans la nuit, nous avons été dévalisés par une bande très organisée, munie de chombo, qui a tout saccagé, en prenant la caisse de 2.500 euro environ, et dévalisé les réfrigérateurs et le téléviseurs. Ils ont blessé à coups de chombo deux de nos résidents, l’un a le pied cassé », nous relatait Patrick Lopez à la tête de la Communauté.
La DJSCS et des collectivités commencent à s’organiser pour délivrer cette semaine des repas à la population.
Anne Perzo-Lafond