L’épidémie de coronavirus est un sacré coup dur pour les compagnies aériennes. Air Mauritius, intégralement dépendante du tourisme, est désormais placée en redressement judiciaire. Air France pourrait bénéficier d’un gros apport de l’Etat pour survivre à cette période de disette. Mais les clients sont aussi les grands perdants des annulations de vols à répétition, alors que la loi les protège en théorie.
En effet, des millions de voyageurs voient leur vol annulé sans date de report, mais surtout… sans remboursement à la clé.
Et c’est là que le bât blesse selon l’UFC Que Choisir qui menace de poursuites judiciaires 57 compagnies aériennes, dont Air Austral et Corsair, mais aussi Air Mauritius, pour ne citer que les compagnies régionales. Air France est aussi dans le collimateur.
« Après que certaines compagnies ont fait exploser le prix des billets des Français bloqués à l’étranger au début de la crise, nombre d’entre elles entendent aujourd’hui renier le droit à remboursement des millions de passagers aux vols annulés en leur imposant un bon d’achat » déplore l’association en préambule.
« Les compagnies, après avoir vainement tenté un lobbying pour faire changer la réglementation, mènent aujourd’hui une campagne de désinformation portant sur les modalités de remboursement des consommateurs » poursuit l’UFC Que Choisir.
L’organisme de défense des consommateurs vise le non respect de la réglementation européenne en cas d’annulation de vols.
Les 57 compagnies visées « imposent en toute illégalité un avoir à validité variable, retardent le remboursement ou appliquent des frais de modification.
La réglementation européenne est pourtant claire : en cas d’annulation de vols, la compagnie aérienne est tenue de proposer en premier choix au consommateur le remboursement du billet, dans un délai de 7 jours, au prix auquel il a été acheté. »
Des mesures commerciales risquées pour le consommateur
Concernant la compagnie Air Austral, les « mesures commerciales souples » adoptées sont détaillées sur le site de la compagnie. En cas d’annulation, la compagnie propose un report de vols « sans frais », ou « possibilité de modification de la destination sans pénalité et avec un réajustement tarifaire si applicable. »
Sinon, Air Austral propose « en cas d’annulation de vol ou sur demande du passager, [un] remboursement intégral possible, sous forme d‘un avoir ».
Cet avoir serait « de la valeur totale du billet » et « valable 1 an à compter de la date d’émission de l’avoir. »
Mais surtout il est « à réutiliser sur les vols opérés par Air Austral et les vols en code share Air Austral /EWA . Cet avoir, s’il n’est pas utilisé avant sa date d’expiration, sera remboursable au bout d’1 an. La demande de remboursement devra se faire un jour avant sa date d’expiration. »
Des conditions pas si souples que ça donc, et qui font fi de la réglementation en vigueur telle que rappelée par le site « service public.fr »
Selon ce site officiel qui vulgarise les lois applicables en France, en cas d’annulation la compagnie doit proposer un nouveau vol « sans paiement supplémentaire ».
Si ce « nouveau vol » n’est pas possible, « la compagnie doit vous rembourser votre billet dans les 7 jours francs si vous ne souhaitez pas ou ne pouvez pas attendre le prochain vol. Votre compagnie doit vous proposer ce remboursement et vous n’avez pas de démarches supplémentaires à faire ».
Un remboursement qui peut s’accompagner d’une indemnité de 250€ à 600€ selon la distance du vol.
Le site public rappelle aussi que « vous avez 5 ans pour réclamer votre indemnisation »
Si la compagnie refuse de vous indemniser, ou si vous trouvez que cette indemnisation est insuffisante, vous pouvez faire un recours auprès de la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) ».
Laisser le choix aux passagers
Pour l’UFC Que Choisir, la proposition d’avoir est un gros risque pour le voyageur « car il n’existe pas de fonds de garantie dans le transport aérien (…) si la compagnie aérienne fait faillite, le consommateur qui s’est vu imposer un avoir ne voyagera pas et son argent sera perdu alors qu’il devait être remboursé. »
« Alors que les Etats membres s’engagent dans les plans d’aide auprès des compagnies aériennes, financés par les contribuables, les consommateurs ne doivent pas devenir des préteurs publics quitte à être sacrifiés. Cela équivaudrait à une double peine » conclut l’association.
Sans aller jusqu’à imposer aux compagnies le remboursement immédiat, l’UFC Que Choisir demande a minima à ce que celles-ci respectent « le droit des passagers en leur proposant en premier lieu le remboursement en argent du prix des billets annulés » et leur laissent « le choix (…) du mode de remboursement qui [leur] convient »
Y.D.
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