Arrêtons nous tout d’abord sur les cas quotidiens. On nous demande de regarder les 98 de ce samedi avec rondeur, « il n’y a pas eu de pic », revient la directrice de l’ARS Mayotte, qui appelle régulièrement les médias à raccrocher le nombre de cas quotidiens au jour de prélèvement, « et non au jour de l’analyse ». Des détails que nous n’avons pas. Nous pouvons donc juste lisser le nombre de nouveaux cas sur l’ensemble des journées précédentes, le nouveau diagramme en bâtons de l’ARS exposant les cas hebdomadaires est donc plus fiable.
L’utilisation des tests est toujours sujet à discussion avec la directrice de l’ARS. Élément fondateur de la politique réussie en Allemagne ou en Corée du Sud dans la lutte contre l’épidémie, ils sont vus comme un guide d’aide à la décision à Mayotte : « Notre nouvelle stratégie recouvre le test de personnes présentant des signes clinique typiques, de fièvre ou de perte d’odorat, et de personnes liées à un risque épidémiologique », c’est à dire de personnes contacts d’un malade. Dans 3 semaines, une nouvelle machine de tests doit arriver à Mayotte, « et samedi, nous avons passé une nouvelle commande, qui permettra de palier à toute rupture de stocks en réactifs ».
La cause de la frilosité dans la pratique des tests tient aux stocks. Malgré le pont aérien et les arrivées de navires militaires, nous sommes toujours en tension sur les réactifs, les écouvillons ou les tubes, tous ces « consommables » destinés aux tests, « la pénurie est nationale, et nous avons été longtemps considérés comme non prioritaire », ce qui aurait changé depuis le passage de stade 3. En attendant, il ne faut rien gaspiller ! « On s’aperçoit que les tests à haute dose ne sont pas forcément efficaces. Un jour, 200 prélèvements ont été effectués, ils étaient tous négatifs ! »
Dix lits de réa pourraient sauter
La préoccupation de l’ARS porte sur les arrivées toujours plus nombreuses de malades en médecine, « nous en sommes à 50 en tout, dont 10 en réanimation », et sans compter la dengue et les autres maladies. C’est pour soulager ces effectifs croissants que l’hôpital de campagne a été annoncé par Annick Girardin, la ministre des outre-mer.
Le terme sonne bien. Un « hôpital de campagne », ça envoie en terme d’image de capacité supplémentaires de médecine, surtout que le service de santé des armées y est associé. C’est ce qui a été implanté à Mulhouse pour soulager l’hôpital, au plus fort de la crise. Et c’est notamment un de ses modules, démonté, qui doit être transplanté à Mayotte. Seulement, ici, il ne vient pas en renfort mais en substitution, et pas dans le service en tension, rapporte Dominique Voynet : « Nous n’avions pas demandé cet hôpital, mais des renforts en personnel. Surtout qu’il serait axé sur le service de chirurgie de courte durée, avec une implantation de 10 lits. Or, ils se substituent aux 10 lits que nous voulions installer dans le service de réanimation qui est en train de s’essouffler. » Un sujet qu’elle va devoir trancher d’urgence avec le ministère de la Santé.
Les renforts arrivés en Réserve sanitaire sont insuffisants, « il n’y a pas assez de médecins ou d’infirmiers réanimateurs », un appui supplémentaire a été demandé.
Transfert des malades Covid vers La Réunion
En attendant d’accroitre les capacités de l’hôpital en collant aux besoins, certains des malades sont évasanés, « y compris les Covid + depuis vendredi ». Le préfet de La Réunion, qui n’enregistre plus de nouveaux cas sur son territoire, informait de 8 évacuations sanitaires ces derniers jours, dont 3 étaient placés en réanimation.
Des évacuations qui ont fait donner de la voix à La Réunion, certains ne comprenant pas que le territoire qui a réussi à vaincre la propagation du virus, accueille de nouveaux cas. Or, le même transfert a été pratiqué en métropole entre le Haut Rhin et le Tripode à Bordeaux. « C’est le rôle du centre hospitalier Universitaire de La Réunion de les accueillir, au sein d’une unité spéciale Covid montée pour la crise qu’ils n’ont pas eue là-bas. Nous envoyons moins de 30 personnes par semaine, quand en temps normal, nous en évasanions environ 150 par mois. Et tous les patients sont testés au départ, qu’ils soient positifs ou négatifs. Et les avions sont désinfectés. » De toute façon, c’est maintenant une certitude pour tous qu’il va falloir vivre durablement avec le virus, en l’absence de vaccin.
Les masques restent toujours un sujet. La commande de 850.000 passée par le conseil départemental à la Chine semble s’égarer dans la nature. La directrice de l’ARS évoque quasiment une arnaque dont aurait pu être victime le conseil départemental*, et le préfet la situe vaguement au Luxembourg. Un investissement de plus de 600.000 euros pour le Département. Par contre les 450.000 grands-publics commandés par la préfecture et le Département à Madagascar sont en cours de distribution à la population. « Et alors que nous étions en pénurie sur le plan national, l’ARS a malgré tout fourni en masques chirurgicaux les équipes de l’hôpital, des PMI, du secteur médico-social, des CCAS, et bientôt la prison », conclue-t-elle en félicitant ses équipes.
Anne Perzo-Lafond
* Le conseil départemental se veut rassurant sur l’arrivée prochaine de la marchandise
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