Annick Girardin est arrivée avec un automate de test supplémentaire ainsi que 9 respirateurs, des masques chirurgicaux et 16 personnels du service de santé des armées. Avec une prise de conscience souligne Dominique Voynet : « Pour répondre aux 400 tests par jour qu’on nous demande, la ministre a compris l’urgence de sécuriser l’approvisionnement en consommables de tests », notamment en réactifs, mais aussi en curare.
Des machines et des hommes. Les premières parce que comme l’avait déjà signalé la directrice de l’ARS, certaines sont vétustes, « à la suite d’une panne informatique, le laboratoire du CHM n’a pas pu travailler dimanche et lundi », quand d’autres nécessitent un approvisionnement régulier, « le laboratoire privé est en rupture de kit de réactifs, le réassort doit arriver jeudi. » Double peine donc sur les prélèvements au moment où nous en avons grandement besoin. Des hommes et des femmes ensuite. « Les deux épidémiologistes arrivés avec la ministre vont nous permettre d’améliorer nos prédictions. Et je travaille en parallèle avec la directrice du CHM pour sécuriser les prélèvements et les acheminer vers le laboratoire. Car tous nos spécialistes ne maitrisent pas la biologie moléculaire. D’autre part, nous attendons l’ingénieur qui doit venir installer les nouveaux matériels reçus. »
Sur la situation épidémiologique, Dominique Voynet se veut rassurante : « Nous ne voyons pas de signe d’aggravation rapide de la situation, malgré un déconfinement de fait dans la rue. Une cinquantaine de malades sont hospitalisés au CHM, dont 11 en réanimation, « avec un bébé en raison de son petit poids à la naissance ». Un patient mahorais évasané à La Réunion il y a 10 jours, y est décédé ce mercredi. Quand à la personne de moins de 41 ans qui a perdu la vie avant-hier, elle présentait un état de santé dégradée, « elle n’est pas décédée directement à cause du Covid ».
Arrivée dimanche de l’avion sanitaire de dépannage
On sait depuis plusieurs jours que l’hôpital de campagne des militaires sera citadin par manque de place en extérieur, il doit intégrer une aile de l’hôpital avec un travail déployé par les 16 arrivants avec la ministre pour la meilleure insertion possible au sein du CHM.
Nous avons déjà consacré de longues pages aux capacités aériennes d’évacuation sanitaire, pour au moins garder le rythme de 150 par semaine antérieur à la crise. La directrice de l’ARS a de nouveau évoqué la frilosité du personnel d’Air Austral à l’idée de transporter des patients Covid+, « la situation s’est débloquée ces jours ci alors que nous avons contractualisé avec une autre société pour l’avion sanitaire. De toute façon, nous devions trouver une solution pour pouvoir évasaner en dehors des 3 jours de desserte hebdomadaire actuels par Air Austral ».
La directrice de l’ARS s’expliquait sur le choix de la compagnie, le sujet faisant le titre d’un média réunionnais ce mardi, qui reprochait de n’avoir pas donné priorité à Ewa Air, à actionnariat pour moitié mahorais et pour l’autre d’Air Austral : « Les appareils de Run Aviation et de Ewa ne présentaient pas assez de capacité en nombre de civières et de temps de vol assez court pour préserver la santé du patient ». En outre, le coût aurait été prohibitif, selon Dominique Voynet, « nous ne pouvons pas nous permettre de débloquer tous les jours 25.000 euros ». Le choix s’est porté sur un Embraer 145 du groupe Regourd Aviation, « nous avons signé un contrat sur la période de l’état d’urgence sanitaire, sous la férule du contrôle budgétaire du ministère. » L’avion doit arriver dimanche. Quant à doter l’hôpital d’un avion sanitaire pérenne sur le territoire, aucune décision n’est prise, ce sera par le biais d’un appel d’offre pour glaner des fonds européens, a-t-elle répété.
Rentrée scolaire et déconfinement
Autre polémique, l’accusation portée contre l’ARS Mayotte par le patron de Transport posthume Mayotte, d’avoir été au contact de cinq corps contagieux sans en avoir été prévenu. « Du fait que les médecins mettent en danger ma vie, j’ai pris le parti de décacheter systématiquement le volet confidentiel des certificats de décès comportant la cause de la mort », explique ainsi Jean L’Huillier dans le Canard Enchaîné de ce mercredi. Le Collectif des citoyens d’Estelle Youssouffa avait saisi à ce sujet le Conseil d’Etat. L’ancienne ministre indique qu’il n’est pas possible pour l’ARS d’avoir accès aux données, « par contre, certains patients refusent que leur famille sache qu’ils étaient porteur du Covid, ça ne leur est donc pas signalé. Et des enterrements ne respectent pas la consigne de ne pas faire la toilette du corps et d’enterrer directement dans un linceul. Enfin, des tests pratiqués sur le défunt ne sont connus qu’après l’enterrement très rapide ici. » Elle s’en remet à la décision du Conseil d’Etat.
Le temps passe, et la date du 25 mai approche. Celle de l’ouverture possible de quelques écoles et d’un début de déconfinement officiel. En matière de rentrée scolaire, Dominique Voynet marche désormais sur les œufs – et ce n’est pas son sport favori – pour ne pas empiéter sur les plates-bandes du recteur : « Que ce soit la réouverture des commerces, des services des administrations ou des écoles, je demande de respecter les gestes qui protègent », explique-t-elle en résumé.
Quant au début du déconfinement le 25 mai qui correspondrait avec la date éventuelle de l’Aïd El-Fitr (le 24 ou le 25 mai) et des gros rassemblements familiaux, c’est un sujet pour le préfet, « mais il faudrait commencer par en appeler à la responsabilité individuelle et civique de la société ». Houlà ! Un thème qui n’est pas encore maîtrisé en métropole, et qu’il va bien falloir mettre au cœur du débat. « Une de vos tribune du JDM d’Issihaka Abdillah le disait, nous devons nous apprêter à vivre dans un monde nouveau », une conclusion en forme d’ouverture.
Anne Perzo-Lafond