Le recteur de Mayotte navigue à vue depuis plusieurs jours, entre les annonces tonitruantes de l’Association de maires de Mayotte au nom de l’ensemble des maires bien qu’en comité réduit, et les deux pas en avant et un en arrière, voire trois, de quelques autres refroidis par les enjeux. Bilan ? « Six communes sont prêtes à ouvrir quelques écoles, il y en aura 15 à 20 en tout ». Avec des quotas ne dépassant pas les 15 élèves par classe, ce sont 2.000 à 3.000 élèves qui sont attendus en CP-CE1 et Grande section de maternelle, au lieu des 52.000 inscrits en primaires.
« C’est un début. Il a fallu vérifier qu’une synergie a été mise en place dans chaque établissement, associant l’équipe pédagogique, les services de la mairie, les directeurs, les parents, etc. Pour que toutes les problématiques soient couvertes, le personnel, les équipes de nettoyage, les points d’eau, le gel hydroalcoolique, les masques, l’aménagement des locaux pour respecter les gestes barrière et le nombre d’élèves par classe », relate Gilles Halbout.
Les communes partantes ouvriront leurs établissements « progressivement sur la semaine ». Bandrélé, Chiconi, Chirongui, Mtsamboro, Mtsangamouji et en décalé, Boueni, vont donc recommencer à accueillir des élèves. « Et la semaine prochaine, toujours progressivement, les communes de Bandraboua, Koungou, Mamoudzou et Pamandzi, devraient être prêtes ».
Une organisation spécifique a été mise en place : « Les directeurs d’école ont contacté une par une les familles des CP, CE1, et de grande section de maternelle pour les informer de la reprise. » Les CP et CE1 étant déjà dédoublés, l’enjeu du plafond de 15 élèves se porte sur les maternelles.
« Ne plus perdre une miette d’apprentissage »
En matière d’équipement, Gilles Halbout a anticipé : « Tous les enseignants auront des masques chirurgicaux et grand-public, et les enfants qui présenteraient des signes de maladie, seront équipés de masques chirurgicaux en attendant qu’ils soient pris en charge. D’ailleurs, nous distribuerons aussi des masques aux parents qui n’en ont pas. » Toutes ces écoles sont dotées de points d’eau, de savon et de gel hydro-alcoolique. Et sur la durée, assure le recteur, « nous avons commandé 1,5 tonne de gel ».
Prémices de rentrée scolaire donc, pour le recteur, qui a bagarré sur un territoire toujours classé rouge pour faire admettre que l’instruction devait reprendre sa place : « Non seulement les enfants ne doivent plus perdre une miette d’apprentissage du français sur les 6 semaines qui nous restent, mais ces jeunes ne peuvent pas rester aussi longtemps isolés comme le soulignent les sociétés de spécialité pédiatrique. » Les représentants de ces sociétés avaient en effet mis en garde contre les excès de prévention dans les écoles, notamment sur les interdictions aux enfants de jouer entre eux, appelant notamment à un retour sur les bancs de l’école.
Une reprise qui se fait dans un département classé rouge comme ce fut le cas la semaine dernière dans les Hauts-de-France, le Grand-Est, ou la Bourgogne-Franche-Comté, en métropole. Et dans ces départements, comme à Mayotte, quelques maires ont pris des arrêtés pour reporter le retour des élèves en classe, ne sentant pas prêts pour répondre aux strictes mesures sanitaires. Mais parfois, la justice rappelle les élus à l’ordre. A Bobigny, dans le département de Seine-Saint-Denis classé rouge également, sur une plainte des parents d’élèves de la FCPE, le tribunal administratif a ainsi ordonné au maire de rouvrir ses écoles qu’il voulait laisser fermer jusqu’en septembre, signifiant qu’il s’agissait d'”une atteinte au droit à l’éducation”, rapporte le média national rtl.fr.
En métropole, la 1ère phase du déconfinement devait s’étendre du 11 mai au 2 juin. Les collèges ont ouvert dans les départements classés vert. « A Mayotte, pour les collèges et lycées, nous nous calerons sur les décisions nationales portant sur les départements rouges », conclut le recteur.
Anne Perzo-Lafond