L’homme de 23 ans, qu’ils soupçonnaient d’avoir commis plusieurs actes de délinquance, avait disparu à la suite d’un enlèvement et d’« une correction » donnée par 3 individus qui avaient décidé de se faire justice eux-mêmes. Deux de ces derniers s’étaient présentés spontanément à la gendarmerie de Pamandzi dès le lendemain des faits.
Un corps avait ensuite été retrouvé dans le secteur de l’enlèvement, aux Badamiers, et identifié grâce à son ADN comme étant celui de Houmadi Abdou. Quatre auteurs de l’enlèvement avaient donc été mis en examen et incarcérés. Ce qui avait valu au procureur Camille Miansoni une campagne très agressive et avilissante sur les réseaux sociaux.
Des habitants de Dzaoudzi dont certains membres des familles des auteurs de l’enlèvement, se sont concertés et ont décidé de rencontrer le chef du parquet ce mardi. Ayant eu vent de cette rencontre, nous nous sommes rendus au tribunal judiciaire. Si nous n’avons pu y assister, Camille Miansoni a bien voulu nous en donner la teneur générale, sans dévoiler le fond des échanges, comme le souhaitaient ses interlocuteurs.
« Ils ont présenté des excuses »
« J’ai été heureux de rencontrer ces personnes qui ont voulu partager leur douleur pour leurs proches incarcérés, et à la fois évoquer la situation générale de Mayotte. Notamment, leur exaspération et leur colère, leur impuissance aussi face à ce qu’ils considèrent comme une absence de réponse de l’institution. Je comprends tout ça, mais je leur ai demandé de ne pas se tromper de cible, et au contraire, de nous aider par leurs témoignages lorsque des actes de délinquance sont perpétrés. »
Les membres de la délégation sont également revenus sur les injures adressées à l’homme de loi sur les réseaux sociaux : « Ils ont présenté leurs excuses pour les outrances dont j’ai été victime. Je leur ai expliqué mon rôle, et redire que je suis un allié et non un ennemi. J’ai émis le vœu que mon successeur soit aidé dans sa tâche. » Camille Miansoni doit en effet quitter Mayotte en octobre, et le poste pour trouver son successeur a été publié la semaine dernière.
« Je veux souligner leur courage car je sais que certains ont défilé contre moi, sans doute manipulés par d’autres personnes. Ils se sont rendus compte qu’un autre combat était à mener à Mayotte. Il y a matière à s’engager pour que la situation s’améliore, notamment pour que des enfants de 12 ans ne trainent plus dans les rues. Il y a un travail possible entre les institutions et la population, mais pas au mépris de la loi. »
Notons que les auteurs des faits encourent la prison à perpétuité, « mais la qualification reste l’enlèvement et la séquestration suivis de la mort. Mais attention, on ne dit pas qu’ils l’ont tué. »
Une démarche qui va en tout cas mettre un peu de sérénité au cœur de cette affaire… et chez le procureur à quelques semaines de son départ.
Anne Perzo-Lafond
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