Il régnait à Combani une ambiance post-apocalyptique ce jeudi matin, alors que le préfet y était attendu. Les rues étaient quasiment désertes après un nouvel épisode de violences entre les jeunes du village et ceux de Miréréni.
A notre arrivée, les deux blindés de la gendarmerie mobile sillonnaient la route qui sépare les deux villages, zigzagant entre les restes fumants de quelques barrages. Sur le bord de la route à Miréréni, des jeunes encore cagoulés, certains armés de barres de fer, regardaient passer les militaires sans sourciller.
L’un des blindés a un pneu détruit par les obstacles parfois enflammés qu’il lui a fallu franchir la veille. Heureusement les VBRG sont conçus pour rouler quand même avec un pneu HS.
En arrivant au pont qui marque l’entrée de Combani, les gendarmes en blindé se rangent sur le côté, nous demandent de “circuler”. Derrière nous, presque plus aucun véhicule ne sera autorisé à passer, un utilitaire qui s’y risquera aura la vitre fracassée. En arrivant devant le magasin Score, les gendarmes, nombreux, ferment la route, interdisant tout retour par le même chemin.
Sur le petit parking, une infirmière et une enseignante discutent des événements des dernières heures alors que l’odeur du gaz lacrymogène se dissipe lentement.
“Ce matin j’ai vu des jeunes de Miréréni sortir de chez eux avec des parpaings, des chombos, des cocktails molotov, des barres à mine”, témoigne la soignante. “Même des cocos (des grand-mères en shimaoré) ont saisi des parpaings, les habitants sont un peu en mode autodéfense, ou attaque, ou contre-attaque, j’ai l’impression que personne ne veut que ça se calme. Lors d’une réunion de quartier, certains veulent l’apaisement, d’autres veulent contre attaquer, le plus intelligent sera celui qui saura arrêter le premier mais c’est le plus difficile”.
Dans une rue adjacente, un riverain profite du calme sous le porche d’un douka. Il raconte l’arrivée de la bande armée dans le village.
“Des délinquants de Miréréni, ils étaient une centaine, sont venus tout casser. Ils avaient des pierres, des couteaux et des machettes, tout ça. Derrière chez moi une maison a brûlé, des gens ont été blessés”. L’homme évoque quatre maisons brûlées et “12 ou 13 voitures incendiées”. La préfecture confirme le chiffre de 13 véhicules brûlés dans les affrontements, ainsi que plusieurs blessés.
Exposés au risque d’incendie ou incommodés par les gaz lacrymogène, “les habitants fuient le village” déplore l’un d’eux, qui a fait partir ses enfants. A ses pieds, vestiges des violences de la veille, un pavé de grenade lacrymogène et le compteur de la rampe d’eau qui alimentait les bangas tout proches, mais qui a été sectionné : les riverains sont privés d’eau potable.
Y.D.
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