Dans la petite salle de classe, trois enfants d’âges différentes s’affairent sur leurs feuilles sans se laisser intimider par la présence de la directrice du CHM et du recteur venus observer le fonctionnement de ce nouveau service. Depuis plusieurs jours, Corine Drouet-Sicard, enseignante spécialisée, apporte l’école directement au sein du service de pédiatrie.
Issue de l’éducation nationale, avec une expérience “de 29 ans” dans différentes structures, l’enseignante sera chargée au CHM de suivre les enfants hospitalisés.
Pour ces derniers, plusieurs enjeux de taille feront le quotidien de leur professeure.
Le premier est pédagogique bien sûr. Pour les enfants scolarisés, il s’agira de prévenir le décrochage scolaire induit par une hospitalisation longue, ou de multiples passages au CHM pour cause de maladie chronique. Si l’objectif est à terme de mettre en place une “continuité pédagogique” avec les écoles de chaque patient, les premiers jours ont été plutôt axés sur “du renforcement”, avec des patients parfois allophones.
La professeure évoque notamment l’exemple d’un élève “totalement immobilisé et carencé” qui ne peut sortir de sa chambre pour rejoindre la salle de classe. “Dans ce cas, je vais rester 1/4h maximum avec lui, là l’idée c’est vraiment recréer du lien, happer son attention, c’est un travail de réimprégnation, l’autre jour il m’a récité l’alphabet alors qu’ au début il ne parlait pas” se réjouit l’enseignante.
Le lien social, c’est le second enjeu majeur pour ces enfants plus habitués aux blouses blanches qu’aux cours de récréation.
“L’adaptabilité et le lien de confiance, c’est ça le plus important, insiste Corine Drouet-Sicard. “Il faut s’adapter, là la petite n’avait jamais touché un ordinateur, maintenant elle sait s’en servir mieux que moi !”
Education mais aussi lien social
“Il ne s’agit pas uniquement de faire du mentorat, on a aussi dans ce système une vraie salle de classe qui permet aux élèves de travailler ensemble, c’est aussi important de recréer ces conditions de classe où les élèves sont à plusieurs, peuvent interagir, s’aider les uns les autres, on sait que c’est très important pour le développement et l’épanouissement social des élèves” détaille le recteur Gilles Halbout.
“Cette enseignante éducation nationale maintient aussi le lien entre la structure hospitalière et les établissements d’origine pour accompagner l’élève au mieux. C’est aussi la garantie d’une continuité pour les élèves qui sont dans des hospitalisations régulières” poursuit-il.
Un lien avec les écoles qui est indispensable au troisième enjeu, médical cette fois. Car une fois le risque de décrochage scolaire limité, il s’agit aussi de faciliter la suite des soins. Ainsi l’enseignante “va aussi être formée à communiquer sur la maladie et accompagner l’enfant dans une meilleure appréhension de sa maladie pour, chez lui, continuer un certain nombre de gestes sanitaires et sociaux” explique le recteur.
Apprendre à l’enfant à comprendre ses traitements
Pour le Dr Chamouine, chef du service pédiatrique, “adapter le projet pédagogique autour de la maladie” est vital “afin que l’enfant sache lire ses traitements, connaître son taux de sucre, apprenne à interpréter les doses, pour une fois rentré à la maison qu’il n’y ait pas d’échec”. Ce suivi pédagogique axé sur les besoins médicaux de l’élève permettront aussi à l’Education nationale de s’adapter pour accueillir l’enfant dans les meilleures conditions à sa sortie du CHM.
“Le professeur fera aussi le lien avec l’éducation nationale pour que les conditions particulières que nécessite l’état de l’enfant à l’école soient respectées” salue le praticien.
Continuité pédagogique, médicale et lien social seront en quelque sorte la triforce d’une hospitalisation plus sereine. Et pour l’instant, personnel comme enfants semblent y trouver leur compte. « C’est du bonheur, vraiment, tout le monde est très content » s’enthousiasme Corine Drouet-Sicard.
Y.D.
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